Chroniques

Le Bar de la plage – épisodes 157, 158 et 159

Episode 157

Nice weather

Pas si sûr. La météo marine locale a lancé un avis de gros temps sur la région. Les bateaux au port, les mouettes aux abris ; ces gens-là c’est du sérieux, et ici, du gros temps , ce n’est pas une attraction à DisneyLand. N’empêche…. Parler du temps qu’il fait présente bien des avantages…

Les Anglais civilisés, quand , “in the morrning” croisent un voisin, ils se saluent par un “Nice weather, isn’it?” et celui-ci de répondre aimablement “Yes, it is”. Même si à l’évidence il pleut des cordes ; et personne dans leur entourage ne s’aviserait de leur dire “ça va pas non, vous voyez bien qu’il pleut des cordes !” Pas de contestation, pas de conflit, pax britannica.

Autre facette. Les Miss Météo télévisuelles de service agrémentent leurs prévisions de tenues sexy et de sourires charmeurs même si elles viennent d’annoncer la tempête du mois sur les côtes bretonnes et quinze départements coincés dits en vigilance au moins orange. Voilà qui fait passer la pilule des autres nouvelles catastrophiques qui ont précédé ou vont suivre.

Evidemment, le sujet préoccupe , et pour de vrai, les vendeurs de parapluies ou de bikinis, ainsi que les marchands de glace (ou de marrons grillés selon la saison) dont le commerce dépend fortement des conditions climatiques.

Par chance (ou pas d’ailleurs), les soirées in-door du Phare échappent à ces aléas, nous voilà sauvés ; même si la programmation musicale laisse à désirer, par exemple commencer la soirée avec Et j’ai crié Aline (Cristophe) et la finir avec Capri, c’est fini (Hervé Vilard) à la place de Papa Tango Charlie de Mort Schumann ou Nuit magique de Catherine Lara comme je l’avais suggéré, n’est pas terrible. Si vous avez une chanson préférée, dîtes-la donc à Georges, on essaiera de la passer un prochain soir.

Le vent a forci. Fermer les écoutilles. La météo marine a toujours raison.

Episode 158

Pas de nouvelle du Messie et autres bricoles

Cela faisait un bout de temps qu’on n’avait pas vu le vieil homme ; d’accord il ne vient jamais quand on l’attend. Mais comment peut-il savoir qu’on l’attend ? Mêmes considérations en ce qui concerne le Messie (encore que lui on l’attend depuis un certain temps et qu’on ne l’a jamais vu au bar de la plage ni nulle part ailleurs).

Et voilà un mystère de plus ; décidemment on ne sera jamais tranquille.

C’était marée montante avec l’agitation qui va avec. Des tas de gens, même des enfants en bas âge, se précipitent dans les vagues sans autre raison que de se faire malmener ou prendre un galet sur la tête. Comme d’habitude, les plus costauds s’en sortent et font les malins devant les filles.

Un chien d’une race peu aquatique s’ébroue en bordure de l’eau ; il écoute l’ami Pierrot-le fou d’amour jouer Dorothy’s Studio à la manière de Charles Llyod.

La bande au complet (on fera l’inventaire un autre jour) fait le siège du bar ; Georges se débrouille ; quelques potins de passage en vadrouille :

Louise de V serait sur le point de trouver un candidat au poste de troisième mari. Il s’agirait d’un jeune garçon fraîchement diplômé de l’ENA et plutôt ambitieux. La différence d’âge ne le générerait pas. Louise non plus.

Patti Smith aurait récemment rencontré Rimbaud dans un café de Greenwich Village ; renseignement pris auprès de Sofia Coppola qui était aussi présente, il s’agissait simplement du barman qu’elle aurait légèrement confondu (effet post-traumatique d’une fréquentation prolongée des poètes de la Beat Generation et des champignons associés).

Le DJ du Phare se serait procuré un album de Léonard Cohen , ce soir on va encore être triste…

Tiens, voilà le vieil homme… est-ce que quelqu’un l’attendait….

Episode 159

Courrier international

J’écris…eh oui, j’écris… malgré la multiplications de moyens perfectionnés à base de signaux électroniques censés faciliter la conversation entre voisins ou cousins éloignés… Avec un stylo, du papier et la collaboration de quelques facteurs, j’écris à ma tante comme vous le savez cartomancienne en Cornouailles, donc pas à côté du bar de Georges.

Ci-après la transcription dactylographiée.

Chère tante

Ma bien chère tante

(c’est quand même plus tendre qu’un Bonjour ou un Hello qui inaugure la correspondance électronique ordinaire.)

As-tu fini par pronostiquer dans l’ordre le tiercé du dimanche à l’hippodrome près de chez toi ? Pas encore… courage, je ne doute pas que tu y parviendras un jour ; on a vu plus étonnant dans le domaine.

On m’a rapporté que ta clientèle de femmes en espérance d’amour et de mâles inquiets de voir leurs ambitions (je ne détaille pas) couronnées de succès ne faiblissait pas, bien au contraire. Tant mieux. L’avenir est toujours aussi incertain et il paraît que tu te débrouilles assez bien pour y ajouter un pincée de bonheur, quoique aussi incertain. Je fais confiance à ton imagination pour leur en mettre plein la vue. Je m’en réjouis.

Question honoraire, ne sois pas timorée. Rappelle-toi, que chez nous, un fameux psy-quelque chose du nom de Lacan, prenait tellement cher que ses clients étaient obligés de travailler davantage pour le payer, il paraît qu’ils allaient mieux.

Ici, la bande ne s’en sort pas trop mal. L’oisiveté pratiquée avec application et l’absence de morale classique donnent, semble-t-il, d’assez bons résultats.