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Chroniques virales – 10, 11, 12

Chapitre 10

5 Avril 2020.

L’inspecteur Claude Larrie avait pris sa retraite le premier mars. Lui qui avait fait toute sa carrière à Paris dans la BRP ne supportait déjà plus ce confinement à la campagne. La Brigade de Répression du Proxénétisme ne l’avait pas habitué à rester cloîtrer. Sa jolie maison pavillonnaire possédait un jardin, mais ce n’était pas son truc, planter des légumes et les regarder pousser ne l’excitait pas. Il s’était bien dit qu’il lui faudrait un moment pour trouver ses marques. Il tablait sur six mois, un an pour mettre en place des activités. Remplir la dernière ligne droite.

Ça ne pouvait pas plus mal commencer. Sa femme et lui s’apercevaient qu’ils n’avaient pour ainsi dire jamais vécu ensemble. Elle était à la retraite, n’ayant pas eu, pas voulu, pas eu le temps de faire, d’avoir des enfants. Le temps passa, elle, infirmière de nuit aux urgences de l’hôpital Bichât, lui toujours en interventions. Le temps s’écoula ainsi rapidement Les week-end, les nuits étaient le plus souvent solitaires. Les repas froids avalés seul.

Mais dès le début le couple s’était mis d’accord pour quatre semaines de vacances par an. Ils se retrouvaient et ces quatre semaines étaient intenses en émotions. Ils rattrapaient le temps perdu et échangeaient leurs points de vue sur la politique, les faits de société, leurs lectures, leurs envies. Ils s’écoutaient. Ils n’étaient pas dans la spontanéité de l’actualité. La distanciation des événements les poussait à appréhender les choses par l’argument de la  preuve et non par un sophisme quelconque.

Peut-être que leurs activités respectives les poussaient déjà vers ce mode de fonctionnement.

Bref, ils avaient tant espéré de cette retraite. Elle et lui aimaient la culture et ils s’étaient promis qu’ils passeraient du temps dans les musées, les théâtres, les restaurants et bien sûr flâner au gré des routes, comme cette fois où il avait déconnecté le GPS. A chaque croisement il disait à « droite ou à gauche ? ». Marie éclatait de rire et disait « A gauche, non à droite » Ils avaient ri sans fin quand ils se retrouvaient dans un cul de sac, obligés de faire marche arrière pendant 2 kilomètres tellement la route était étroite. Souvent ils firent des découvertes de lieux insolites mentionnés dans aucun guide. Comme cette cascade dans l’Ain ou cette auberge au bord du lac des Tessons où ils dégustèrent de formidables cuisses de grenouilles fraîches. La persillade entre les dents ne réussit même pas à freiner l’ardeur gourmande de la sieste estivale.

S’ils ne trouvaient pas d’hôtel, ils se drapaient ensemble dans cet immense duvet blanc soyeux à deux places. La maman de Claude l’avait confectionné et offert en rigolant le jour de leur mariage. La légende familiale disait que c’était la toile d’un parachute américain et les langues bien pendues des tantes disaient à voix basses, dans des demi-sourires entendus, que pendant longtemps le facteur déposa du courrier avec le tampon « By air ».

N’y tenant plus, il prit son portable et appela le divisionnaire Paul Grad. Après le blablabla obligatoire  sur la retraite, sa femme, le confinement Claude coupa court et demanda abruptement.

– Et le boulot ?

– Rien !

– Comment rien ?

– Que dalle, avec le confinement plus rien, plus de prostitués sur le trottoir, le bois est fermé.

– Saint Denis ?

– Rien, Barbès, Saint Denis, je te dis qu’il n’y a plus rien. Même le boulevard des maréchaux, c’est dire. Chômage technique pour nous tous.

– Tu sais bien que c’est impossible. Les macs ont déjà trouvé une parade.

– Peut-être, on cherche, mais franchement le virus les a calmés.

– Mais tu sais que quand le sida a débarqué tout a continué, alors il doit y avoir un truc qui nous échappe.

– Claude, on ne va pas inventer. Je te dis que c’est à l’arrêt.

Claude pris congé de Paul. Il ne dormit pas de la nuit. Il avait passé trente ans à démanteler des réseaux de prostitution. Il avait connu les Italiens, les Corses, les Tchétchènes, les Russes. Tous rivalisaient d’ingéniosité.

Claude ne les admirait pas. Il avait trop souvent poussé des portes et vu trop de visages vitriolés, de corps mutilés, de visages édentés et des vies à la dérive où la dose se négocie à 10 passes.

Ils les détestaient. Mais quelques fois le talent de fraudeurslui fit dire que ces gars dans une autre vie, une autre éducation dans un pays différent ou simplement en paix, auraient été de brillants inventeurs.

Pour le moment il était là, assis dans son canapé, les yeux dans le vague. Il confia son désarroi à Marie. Elle l’écouta et quelques instant plus tard elle posa sur la table basse un apéritif généreux avec tout ce qu’il aimait. L’enjambant, s’asseyant sur ses genoux, face à lui, elle lui prit la tête à deux mains et dans son baiser lui murmura :  Décroche !

Il se réveilla au petit matin. Apaisé. On sonna à la porte. Il allait pour ouvrir et se rappela les mesures de confinement. Il n’ouvrit pas et demanda qui était là. Je suis le livreur. Je cherche Monsieur Lobert, c’est pour un colis.

Il lui indiqua que Monsieur Lobert habitait trois maisons plus bas à l’angle de la rue. Il le remercia et s’en alla. Quelques secondes plus tard il vaporisa de l’alcool sur le bouton de la sonnette. Ce confinement rendait dingue tout le monde. Lui qui pourtant avait investi les bouges les plus crados de Paris, où des filles faisaient de l’abatage quinze heures sur vingt-quatre. Il en avait encore l’odeur dans le nez. Il se demandait comment des hommes pouvaient y prendre du plaisir. La couleur des matelas noircis par les champignons et les sécrétions lui donnaient des hauts le cœur encore aujourd’hui.

Il se regarda piteusement utiliser son pulvérisateur hydro-alcoolique.

Il ne pouvait se résoudre. Ces hordes d’hommes en manque, ils les avaient vues. En file indienne attendant un orgasme bref à l’arrière d’une cabane de chantier. Ce virus ne les effraierait pas.

Il devait y avoir une combine. Laquelle ? Cette impasse le rendait fou. Il savait. Son instinct lui disait que la fraude était là sous son nez.  L’instinct ?

Son cerveau lui envoyait des signaux forts. La répétition de trente ans de situations avait façonné, modelé sa capacité à activer ses capteurs sensoriels. Un bruit, un visage vu deux fois dans un endroit incongru mettait en éveil son cortex préfrontal .

Il annota son attestation de déplacement. Il avait droit à une heure pour se dégourdir les jambes. Une heure à faire aboyer chaque chien de chaque maison du quartier. Un chenil, ce quartier !

Il arriva en bas de la rue. Le livreur discutait avec Monsieur Lorbet, très distingué en robe de chambre rouge jetée sur les épaules. Il avait été directeur du centre des impôts. Ses conseils avisés lors de son départ à la retraite lui avaient servi à défiscaliser ses heures supplémentaires accumulées. Il le salua de la tête. Il poussa sa sortie jusqu’au bureau de tabac et y acheta non pas des cigarettes mais quelques revues de camping-car en se disant qu’après ce merdier il se ferait bien un « gauche/droite » à travers l’Europe cette fois ci.

Sur le retour le fourgon du livreur était toujours à la même place. Le chauffeur assis au volant tapotant sur son Driver.

Commençant à longer le véhicule, imperceptiblement le fourgon se mit à bouger avec ce léger rebond tellement vu dans sa carrière. L’adrénaline submergea l’inspecteur. Il croisa le regard du livreur. Tout s’éclaira. Le livreur envoya sa main à l’intérieur de son blouson tout en fixant le flic. Trop tard. L’inspecteur expédia deux balles de 9 mm. Une à la suite.

L’hypothalamus explosa. Le centre des comportements de défenses était détruit. Accessoirement celui de la reproduction aussi. Mais dans l’instant présent cela n’avait que peu d’importance. A moins qu’il ne soit aussi étudiant en neurologie et très préoccupé d’avoir une descendance. L’enquête le dira.

La porte latérale s’ouvrit. Il vit dans le viseur son directeur des impôts détalant nu, imberbe, la peau flasque,maigre.

A l’intérieur, il y avait, apeurée, en boule, nue sur une couverture sale, une jeune noire de seize ans. Moins peut être.

Paul se confina. Et ne commanda plus rien sur internet.

D’habitude les livreurs sont toujours pressés.

Si demain le fourgon du livreur reste cinq minutes immobile devant la maison de votre voisin…

 

Chapitre 11

Dimanche 2 juin 2030.

A 18h30 précise, James Conrad dépose délicatement son mug de café insipide. Il approche ses yeux de son écran de contrôle. Les dents crissant sous la pression de sa mâchoire, les mains en prière sur son nez, les yeux immenses, imprégnés d’effroi, il ne peut retenir un râle rauque.

James Conrad est le petit fils de Charles Conrad, le troisième homme à avoir marché sur la lune et dont tout le monde a oublié l’existence. James, enfant, appréciait ses histoires épiques. C’était son héros. Il voulait toujours en savoir plus et son grand père ne se faisait pas prier pour lui fournir les moindres détails de ses aventures spatiales. Il en avait retenu, va savoir pourquoi, que son grand père était le plus petit des 12 astronautes à avoir foulé le sol lunaire et que le confinement ne le gênait pas trop.

Comme lui il aimait le golf, le ski nautique, toutes les activités de plein air. Il avait fait sienne la devise de papy Charles. «Si tu ne peux être bon, soit bronzé»

Pour sa part il avait bien essayé de se mettre dans ses pas. Il passa brillamment une multitude de diplômes en aéronautique, en physique, pour finir docteur en astronomie à la NASA. Son rêve d’être astronaute disparut. La sélection était devenue impitoyable. Aujourd’hui il était la référence mondiale dans son domaine : les éruptions solaires.

Ce qu’il voyait sur l’écran était la pire des choses qui pouvez advenir.

Depuis la pandémie de 2020 et en lien avec le réchauffement climatique les virus et bactéries se développaient à grande vitesse. Les grands patrons des GAFA qui avaient survécus à l’instar d’Elon Musk, que l’on prenait maintenant pour un illuminé, avaient construit des villes isolées, sous une sorte de bulle où l’air respiré n’était pas celui du commun des mortels. Ils s’y sentaient en sécurité. James pensait souvent à ces magnas de l’internet confinés définitivement. Cela lui faisait penser à Globalia, ce livre présenté par sa sa femme française, lors d’un club de lecture.

Les biologistes et scientifiques avaient eu 2 ans de répit pour mettre au point des systèmes d’alertes. La Corée du sud avait expérimenté, lors de l’épisode de 2020, des techniques de confinement ciblées sur les individus. C’était devenu le standard mondial en matière de confinement. Ainsi l’activité économique était très peu impacté. Tout était basé sur les réseaux et leurs fantastiques vitesses. Nous étions rapidement passé à la 6G rendue possible par l’installation massive d’ordinateurs et de serveurs quantiques. Les liaisons satellitaires assuraient un maillage efficace de la planète dès que des réseaux terrestres tombaient en panne.

Dix secondes après 18h30, James su que tout cela serait détruit en 18 secondes. Les calculateurs donnaient tous quatre jours à l’humanité avant que la catastrophe n’arrive.

Les quatre gigantesques tâches à la surface du disque rouge et jaune allaient se transformer en éruption. Elle ne serait pas assez puissante pour exterminer l’espèce. Non ils survivraient. Mais trois mois plus tard ils seraient revenus à l’âge de pierre.

James savait déjà les mots qu’il emploierait devant les milliards de téléspectateurs au travers des chaînes info qui le solliciteraient, lui, le spécialiste des phénomènes éruptifs.

A 8h30 le lendemain matin il prit place devant 300 journalistes dans le grand hall de la NASA.

Le silence se fit. Instantanément.

Il commença. Gravement.

-Les hommes au cours des âges ont subi sans s’en rendre compte des milliards d’éruptions solaires. Les aurores boréales ont fasciné nos ancêtres vivant sur la banquise. Cela n’avait pas d’autres effets que de faire naître divinités et croyances dans les esprits.

En 1859 on vit une aurore due à une éruption massive du soleil. Ces bouffées de particules traversant la magnétosphère de notre planète émettent des champs magnétiques. Ce jour-là, à Panama, on pouvait lire son journal à minuit. Ce qui rendit la chose plus impressionnante encore est que le réseau télégraphique en développement fut détruit. Le monde continua. Les journaux de l’époque  relatèrent ce fait comme une curiosité scientifique.

Le 13 mars 1989 le phénomène entraîna l’effondrement d’une partie du réseau électrique du Québec et des perturbations radio sur l’ensemble de la planète.

Nos équipes ont alerté sans relâche les gouvernements des pays développés pour sécuriser nos réseaux de communications et électriques. Des moyens techniques existaient. Ils étaient chers et la plupart des pays industrialisés n’ont rien fait.

L’impact de cette éruption, détectée il y a maintenant 14 heures, se produira dans 4 jours, le jeudi 6 juin 2030 à 19h36 GMT.

James avala sa salive et reprit.

– L’ensemble de nos réseaux va être endommagé, la plupart détruits. Les premiers touchés seront nos 44 astronautes dans l’ISS Max. Sachant qu’il faut 5 jours pour rejoindre la station… James marqua une pause par décence et compassion envers eux.

Nos satellites des réseaux GPS, qu’ils soient russes, américains ou européens seront mis hors d’usage et plus aucun avion, bateau ni voiture connectée ne circuleront. Idem pour internet et la téléphonie.

Les réseaux terrestres d’électricité seront pulvérisés. Quelques minutes plus tard, les stations de pompage seront à l’arrêt. L’eau deviendra une denrée rare.

L’industrie s’arrêtera instantanément. Les centrales nucléaires ne pourront plus refroidir leur cœur. Ils rentreront en fusion.

Le docteur baissa la tête et dit sur un ton blanc.

-Des questions ?

Habituellement on aurait entendu un brouhaha de questionnement. Là, le silence s’imposa. Terrifiant. Seul au fond de l’immense hangar, la grande porte coulissante entrouverte sur la vision des pas de tirs, gloires de notre espèce toute puissante, émettait un léger cliquetis dû aux vents chauds remontant en rafales des Keys jusqu’à Houston.

Une journaliste avec son micro marqué NHK était incapable d’analyser ce qu’elle venait d’entendre, son cerveau ne pouvant admettre l’indicible. Son cerveau essaya de créer du sens en formulant cette question :

-Docteur qu’en sera t-il du suivi des pandémies ?

Le docteur ne répondit pas et regarda la foule de journalistes courir vers la sortie. Ils levèrent les yeux en essayant de fixer le soleil.

Ils n’aperçurent jamais le mannequin d’Elon Musk assis confortablement dans sa Tesla Roadster  couleur cerise, tourner en orbite solaire depuis 2018 à la vitesse de 121600km/h. Sans un bruit. En tant que satellite il porte le numéro 2018-017A. Il passera près de notre planète, parfois, pendant 10 000 ans avant de s’écraser sur Terre ou sur Vénus.

Dans la boite à gant un exemplaire du livre «Le guide du voyageur galactique» est rangé dans une serviette sur laquelle est écrit un des leitmotiv du guide.

«Don’t panic»

* Tout est vrai sauf la date et l’heure.

 

Chapitre 12

28 mars 2020

Jean-Marie Gouriot, l’inventeur des brèves de comptoir, n’avait pas le moral. Ce matin, le mal de tête tenace qui l’avait tenu éveillé maintes fois durant la nuit à cause des deux whisky glace pris trop rapidement à l’annonce des quinze jours de  semi -iberté supplémentaires, persistait.

La mort de cette gamine de seize ans l’avait retourné.

Morose il se servit un grand café. Tant qu’il en restait, il en buvait. Ayant décidé de ne plus aller en ville se réapprovisionner, ce serait tisane et quand il n’y aurait plus de sachets, il se tournerait vers le bocal à moitié entamé de chicorée acheté au retour d’un voyage dans le Nord.

L’odeur de son arabica lui fit se remémorer ses années de comptoir. Le zinc, c’était sa vie. Non qu’il fût alcoolique, bien que sa femme en eût toujours douté, mais il avait passé sa vie à écouter les réflexions des habitués. Des sentencieuses, des définitives, des politiques, des sexuelles, sur le travail, sur le couple, des monstrueuses que la syntaxe parfaite rendait glorieuses. C’était son travail d’en faire des brèves de comptoir. La perspective de quinze jours supplémentaires de chômage technique ne l’emballait pas. Pas pour l’argent. Simplement retrouver l’odeur du bar qui disparaissait chaque année. Elle persistait difficilement. La fragrance si particulière du faux cuir des banquettes rouges, à l’empyreume du mou de café mêlé aux arômes du petit blanc du matin, ne survivait que grâce au remugle des fumées froides de cigarillos mal éteints en terrasse.

Il se remémorait ses années passées, où il attrapait prestement son carnet dans la poche intérieure de sa veste en velours côtelé, les empiècements aux coudes glacés par ces heures accoudés au comptoir.

Le carnet s’ouvrait toujours à la bonne page grâce à un système ingénieux que lui avait donné un ami imprimeur. La brève, elle te vient aux oreilles que si tu les tends. Elles peuvent se cacher à l’autre bout du comptoir et couvertes par la vapeur du percolateur en train de réchauffer l’eau du thé, elles explosent. Définitives.

-Quand tu as une vie de con, faut surtout pas être intelligent ; tu souffres plus.

Les réflexions sur le couple c’est surtout à l’apéro du soir, retardant le retour au bercail.

-Ma femme peut pas me quitter, je suis jamais là!

-T’ouvres le journal, ils parlent que des femmes battues, imagine la bonne femme qui prend une rouste et après elle épluche les patates sur sa photo..

-Mon mari m’a tellement trompée que je ne suis pas sûr d’être la mère de mes enfants.

-Je suis resté amoureux de la même femme durant 49 ans. Si mon épouse le savait, elle me tuerait.

Celles sur la vie sexuelle s’entendent le matin juste après le café calva de 6h30. Il faut être à l’affût tant on peut les confondre avec un soupir. Nuits de frustrations trouvant enfin un défouloir.

-Le spermatozoïde, s’il savait qu’il allait faire un gosse, peut-être qu’il irait pas.

-Ma femme dit que la sodomie c’est que sous péridurale.

L’apéro de midi c’est la politique et la religion.

-L’actualité passe tellement vite de nos jours, si tu vas te chercher une bière au frigo tu rates une guerre!

-Les paumés, on devrait les parachuter en plein désert, ils seraient paumés pour quelque chose.

-Vaut mieux pas être croyant et que Dieu existe plutôt que d’être croyant et que Dieu existe pas.

-Les machines ont remplacé ceux qui travaillent, mais un jour elles remplaceront aussi ceux qui ne font rien.

-Les esclaves au moins, ils avaient du boulot.

Les pauvres, quand ils sont à l’hôtel, ils font leur lit.

-Au début le chômage, c’était bien, mais maintenant on est trop.

Maintenant c’est à moi, le pseudo écrivain de prendre le relais de Jean Marie Gourio et d’inventer des brèves de comptoir. Confiné, sa ressource a disparu mais moi, je ne peux pas m’en passer. Dieu que c’est difficile. Je me concentre, écaille un œuf, me sert un rosé frais, allume une papier maïs, pour me mettre en situation. Aussitôt je les vois, je les entends. Ils rentrent, ils sortent, ils en disent une toutes les 30 secondes…Un feu d’artifice de bons mots. La brève est à l’humour ce que la mise en bouche est à la cuisine. Une promesse.

-Ils vont remplacer l’obélisque par une grande seringue, avec des noms gravés dessus.

-Il paraît que le virus n’attaque que les vieux. Le président a déjà l’antidote.

-Avec ma femme au bout d’une semaine, on a essayé l’apéro whatsapp. Chacun dans sa chambre.

-Ma femme a peur d’être intubée. Mourir sans parler ça la terrifie.

-Michel Siffre au bout d’une semaine, il ne savait plus quel jour on était. Moi si, ma femme passe l’aspirateur le samedi à 7h.

-J’ai découvert les circuits courts. Je bois chez moi.

-Mon mari, je pensais qu’il boirait moins. Il mange plus de cacahuètes, c’est tout.

-La nuit y a plus un bruit dans la rue. Quand tu pètes, tu fais aboyer les chiens du quartier.

-L’homme s’habitue vite. Quinze jours sans la voir, j’ai oublié que j’avais une belle mère.

-Avec mon mari on faisait les clubs échangistes. Depuis on échange des mots d’amour.

-J’avais jamais fait gaffe qu’il y avait un JT à 20h. Le bar ferme trop tard.

-C’est les jeunes qui refilent la maladie. Mon mari s’est barré avec une de 22 ans. Qu’il crève!

-Si c’est par la bouche que ça passe, pourquoi les gynécologues, ils donnent pas leurs masques.

-Ils ont dit qu’il fallait se protéger. On a ressorti les préservatifs. On a failli s’étouffer.

-Prenez des nouvelles des aînés ! On a découvert qu’on était vieux, nos nièces nous ont appelés deux fois au téléphone.

-A Cannes ils ont mis les SDF dans le palais des festivals. C’est quand t’as pas de vélodrome.

-Tous les jours, t’apprends qu’il y a 400 morts. Au bistrot c’était un par mois. Comme quoi l’alcool…

-Déjà qu’ils nous ont refilé le virus, en plus on mange du riz tout les jours.

-Après on fera comme avant, on enverra les enfants vendre des timbres.

-Il parait que les enfants sont porteurs. Ça va calmer les pédophiles.

-J’ai découvert que j’avais un meilleur contact avec mon chien qu’avec mes enfants. Au bout d’une semaine, ils me mordent.

-Ce matin, avec ma barbe d’une semaine, ma femme m’a dit que je ressemblais à Bruce Willis. Elle a juste envie que quelqu’un la sorte de ce merdier.

-Ils ont dit qu’il fallait éternuer dans son coude. Ma femme n’a pas aimé.

-Au moins les gilets jaunes, ils n’ont jamais bloqué les bistrots.

-Ma femme pense avoir un amant. Elle n’a plus l’habitude que je lui fasse l’amour à jeun.

-Il a fallu le confinement pour m’apercevoir que mes enfants je les aimais par habitude comme mes perruches.

-C’est la première fois que je me fais contrôler à 15h à jeun et à pied.

-Ils disent d’aménager un lieu convivial dans sa maison. On a fait un bar avec la télé au mur. C’est pas pareil, y a même plus de chevaux pour le tiercé sur Equidia TV.

-Le virus ne s’attaque pas aux oreilles, on le sait depuis que le Prince Charles est positif.

-On a pris 15 kilos. Ma femme a confondu pandémie et pain de mie.

Ils me manquent. Tous. Josiane, Jojo, Sébastien, Albert, Stéphane, Maryse. On a jamais été vraiment amis. Mais c’est promis, dans un mois c’est tournée générale pendant trois jours. Et il y en a bien un qui dira.

-Chin ! Encore un que les chinois n’auront pas !