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Sur un champ miné de bonnes intentions : Francophone Postcolonial Studies (réponse à Sam Haigh)

Une version de cet article a été publiée dans la revue Francophone Postcolonial Studies, 1.2 (2003): 83-93, sous le titre « Sur un champ miné de bonnes intentions : Francophone Postcolonial Studies ».

Dans un article récent, « Sur quelques apports et apories de la théorie postcoloniale pour le domaine francophone », Jean-Marc Moura (2001 : 163) écrit :

« Un ensemble de littératures francophones répond à la notion de postcolonial. À ce titre, il est justiciable des analyses initiées par la critique anglo-saxonne […]. Il est réconfortant de constater […] que les études francophones n’ont pas attendu l’avènement des recherches postcoloniales pour se préoccuper de certains aspects et que nombre de leurs analyses rencontrent les préoccupations des chercheurs postcoloniaux […]. Sans doute est-il de notre intérêt de poursuivre plus systématiquement ces rencontres, de les provoquer afin qu’elles participent d’une volonté délibérée de se nourrir de recherches venues d’horizons différents. Pourrait ainsi se constituer une hybridation études francophones-études anglophones avant d’aborder les champs plus larges, tout aussi passionnants et foisonnants, de la lusophonie et de l’hispanophonie notamment ».

Voilà sans doute l’une des directions que pourrait ou souhaiterait prendre cette nouvelle revue, au titre évocateur, Francophone Postcolonial Studies, puisque, selon Sam Haig, cette publication se propose « d’explorer la dimension francophone des études postcoloniales », et « d’entamer un dialogue essentiel entre les champs anglophone et francophone des études postcoloniales. » Pourtant aussi attirante ou attrayante que puisse être une telle démarche, elle doit être évitée. Du moins, il ne faudrait pas qu’elle surdétermine les décisions éditoriales de FPS.

En effet, la priorité d’un dialogue des pairs anglophones et francophones, avant celui avec les latinités américaines, comme le propose Moura, ne saurait servir les intérêts des littératures francophones. Car, comme il fallait si attendre, pour Moura, la finalité est une quête de soi. Précisant sa pensée (ou son vœu) dans son paragraphe de clôture, il affirme tout bonnement :

« L’intérêt pour nous au contraire, est de voir en quoi les procédures d’analyse nouvelles, les pratiques de lecture voire d’écriture inédites que ces littératures nous contraignent à aborder rejaillissent sur nos recherches critiques concernant les lettres occidentales, en quoi par conséquent l’approche neuve de la littérature initiée à propos des littératures postcoloniales peut modifier, enrichir, approfondir en retour notre regard et notre abord des littératures d’Occident » (Moura 2001 : 166-167).

Le mot est lâché, là est le piège : le projet ne serait pas tant de promouvoir les littératures francophones et leurs poéthiques que de s’en servir pour mieux comprendre les « littératures d’Occident ». Or, s’il doit avoir un dialogue, et il est important, c’est moins entre critiques ou théoriciens du Centre (anglophones ou francophones) que entre les diverses instances de production/réception des œuvres francophones, d’une part, et des instances du Centre, d’autre part. Il ne faut donc pas parler au nom de…, mais plutôt laisser parler, donner à lire, à voir auteurs, éditeurs, libraires, dramaturges, cinéastes, metteurs en scène, critiques… ceux-là mêmes qui font que ces productions existent, circulent. Sur ce plan, l’entretien véritable avec sa dynamique d’approfondissement de l’œuvre dans une confrontation constructive et dialectique des lectures du critique (interviewer) et de l’auteur (interviewé), cette critique dialogique, pour emprunter l’expression de Todorov, dont les Entretiens de Francis Ponge avec Philippe Sollers, entre autres, donnent une bonne mesure, pourrait devenir une des formes priviligiées d’intervention dans l’espace d’échange et de change que devrait être une revue d’études francophones.

Par ailleurs, la réflexion sur le colonialisme européen et ses conséquences a une très longue et très vieille histoire en Amérique, notamment dans les langues latines (espagnol, français, portugais). Il serait donc plus approprié de se pencher sur ces corpus critiques des 19e et 20e siècles pour analyser ces propositions d’alors et d’ailleurs, évaluer leur opérationnalité et leur viabilité pour rendre compte ou non, en partie ou entièrement, des productions francophones.

En fait, la proposition de Moura reprend un parti-pris manifeste des études postcoloniales de marginalisation ou de négation des corpus latino-américains même de langue française, et aussi une hiérarchisation, voulue ou non, des champs et du coup des langues, inscrite dans son titre même : théorie postcoloniale/domaine francophone. L’exception que constitue l’œuvre de Fanon, penseur franco-martiniquais, l’une des figures de proue du postcolonialisme avec Said, Bhabha, Spivak (dont les livres ont été traduits en anglais dès les années 1960), ne devrait pas masquer le fait que ce courant critique se reconnaît plutôt dans l’anglophonie, se veut « anglophone », comme le soulignait avec une pointe d’ironie Sam Haig, dans son courriel d’invitation à participer au premier volume de FPS, qui du même souffle rappelait la résistance française au postcolonialisme.

Mais cette « résistance française », si résistance il y a, a aussi son pendant anglophone, la négation (ou presque) d’une pensée critique francophone. Et il ne faudrait pas gommer le fait fort évident qu’à l’ancienne division géo-politique du savoir (Nord/Sud, Centre/Périphérie), se greffe de plus en plus une autre linguistique (langue anglaise — autres langues européennes/langues non européennes). Bien sûr dans cette triade, la saxonne se veut hégémonique, et le sujet/objet périphérique refoulé dans la chosification complète, ses langues et poétiques indigènes perçues comme non-savoirs, au mieux de vulgaires intuitions (tribalement marquées), comme le rappelle cette note du catalogue de l’exposition de 1987 du Center for African Art de New York, « Perspectives: Angles on African Art », citée par Appiah (1991 : 337 ) : « Field aesthetics studies, my own and others, have shown that African informants will criticize sculptures from other ethnic groups in terms of their own traditionnal criteria, often assuming that such works are simply inept carving of their own aesthetic tradition ». Mais il ne faudrait pas penser que c’est là qu’histoire ancienne. Encore le 6 novembre 1999, au colloque de Yale University, « French and Francophone: The Challenge of Expanding Horizons », une jeune universitaire américaine déclarait (en toute bonne foi) qu’il est plus facile d’enseigner le vodou haïtien que Heidegger. (1) Pour parodier Hassan Musa (2002 : 66) à propos de l’Afrique, faut-il être grand clerc pour comprendre qu’Haïti, comme le vodou, n’échappe pas à la complexité du monde ?

D’autre part, cette « résistance au postcolonialisme » n’est nullement française, elle est plutôt d’ordre intellectuel et assez généralisée. D’ailleurs, elle s’exprime plus fortement en anglais qu’en français. Le refus de l’appellation non contrôlée postcolonial studies ou theories, a été entre autres diversement exprimé, tant dans le contexte des études anglophones qu’hispanophones pour des raisons fort valables que les tenants de la ou des perspectives postcoloniales n’ont pu, à ma connaissance, vraiment réfuter. (2)

En fait, hors du monde strictement anglophone, même les chercheurs qui adoptent la perspective postcoloniale et endossent l’étiquette ont généralement quelques réserves, notamment pour souligner comme le fait Moura (2001) que les préoccupations postcoloniales préexistent au terme et au courant dans leur domaine ou leur contexte linguistique. Un autre exemple fort intéressant est la position de Walter Mignolo, éminent intellectuel argentin de l’université anglo-américaine qui, dans un premier temps, reprend les principales critiques faites au postcolonialisme, mais sans les réfuter conclut qu’i l convient malgré tout d’utiliser ce concept ; puis dans un deuxième temps, dans un mouvement de révision critique (dépassement/déplacement), introduit les notions de postoccidental et postoccidentalisme (« posoccidental », « posoccidentalismo ») emprunté au Cubain Fernando Retamar (Mignolo 1996a et 1996b). Cette dernière formulation de l’après-colonialisme européen antérieure à postcolonialisme que Mignolo semble trouver plus adéquate pour décrire la situation latino-américaine, nous rappelle du même coup qu’ailleurs et avant on a pensé la question de la (trans)modernité et de la colonialité dans la langue du premier empire colonial européen moderne. Comment pourrait-il en être autrement ? Ce vaste sous-continent américain qui a défait le colonialisme européen pour faire face à l’impérialisme états-unien serait incapable de penser ses rapports au monde, s’il n’avait pas su depuis des lustres se donner un contre-discours politique et culturel qui n’est pas sans rappeler le discours dit postcolonial d’après les indépendances africaines plus d’un siècle après les premières indépendances américaines.

Sans remonter aussi loin dans le temps et l’espace, avec les mêmes références politico-philosophiques ou presque des tenants du postcolonialisme des années 1970-1980 (Gramsci, Fanon, Hegel, Max, Mao, Althusser, la révolution haïtienne, le tiers-monde, etc.), déjà en 1978, l’année même où Saïd sort son Orientalism, il se publie à Montréal un texte fort important pour l’analyse des discours dominants, et des réponses de la périphérie, De l’idéologie dominée de Bernard Labrousse. Mais dans le monde postcolonial (anglo-saxon) ce texte est complètement ignoré, comme depuis plus d’un siècle, il ignore la magistrale réponse de Anténor Firmin à Gobineau, De l’égalité des races humaines (1885) dont Carolyn Fluehr-Lobban (2000 : xiv) affirme : « It is as compelling a work of anthropology as E. B. Tylor’s Anthropology (1881) ». (3) Et ce texte majeur reste l’un des rares d’un ex-colonisé (et Noir) de l’époque triomphante du colonialisme européen où, malgré les indépendances américaines, le soleil ne se couchait pas sur l’empire britannique, sinon le seul à avoir articulé un contre-discours convainquant, une réponse cohérente (je dirais postcoloniale et déconstructive avant la lettre) à la thèse dominante de Gobineau qui n ‘a pas perdu (quoiqu’on voudrait nous faire croire) de son attrait pour l’immense majorité du Nord dominant.

Par contre, qu’importe la prégnance ou l’importance du discours colonial ou néo-colonial, hier ou aujourd’hui, l’en jeu n’est pas tant de déconstruire ce canon dominant que de contribuer activement à bâtir, à établir et à promouvoir la diversité des corpus de l’espace francophone — postcolonial ou non, car comme le soutient Mignolo (2001 : 69), « la diversité p lus que l’universalité est la véritable alternative à la globalisation ». Aussi, faut-il, à tout prix, éviter le piège de ramener les études francophones à un corpus de textes du XXe siècle des pays du Sud anciennement colonisés par des puissances européennes. Un texte francophone n’étant pas forcément (un texte) d’u n écrivain dit francophone, i.e. un écrivain né ou résidant dans l’espace francophone, et encore moins celui d’un ex-colonisé : Maria Chapdelaine (1916), généralement reconnu comme un texte fondateur du roman « canadien-français », est tout de même d’un écrivain hexagonal, Louis Hémon. Aussi, un écrivain francophone n’appartient pas nécessairement à une littérature francophone (les cas sont nombreux et anciens : Bianciotti, Beckett, Casanova, Cioran entre autres (4)), comme la littérature d’un état ou d’un espace francophone n’est pas exclusivement de langue française. Il en est ainsi, par exemple, des littératures algérienne (pensons aux œuvres de Khateb Yacine en français et en arabe dialectal, ou celles de Rachid Boudjedra en français et en arabe classique) ou haïtienne (les œuvres d’un Frankétienne en français ou haïtien et d’un Michel-Rolf Trouillot en français, haïtien et anglais sont fort éloquentes sur ce point).

Par ailleurs, dans la mesure où les études francophones sont d’abord et avant tout des études de pratiques langagières d’expression française, notamment littéraires, c’est d’abord la littérature qui devrait être l’objet privilégié des recherches et d’une revue d’études francophones, d’autant plus que l’écrasante majorité des chercheurs, pour ne pas dire aucun, ne peut maîtriser les nombreuses formes d’expression culturelles de l’espace francophone qui s’actualisent dans des centaines de langues ou sémiotiques et de poétiques différentes, sinon distinctes. Il faut être bien prétentieux pour se croire apte à saisir toutes les expressions culturelles même d’un sous-ensemble aussi peu hétérogène que l’espace francophone maghrébin. Donc face à une habilité si limitée de valider les recherches sur des ensembles aussi divers, pour ne pas sombrer dans de permanentes affaires Sokal (où des vessies deviennent des lanternes aveuglantes) (5), il conviendrait d’appliquer la simple règle du bon sens de la stricte limitation des champs d’études, d’oublier le chant des sirènes généralisantes/globalisantes (ou totalisantes) pour sortir du spéculable (le fantasme théorique/téléologique) et retourner à l’explorable, le mesurable. Le piège des pièges des tenants du postcolonialisme (comme parti pris ou perspective de recherche) est le glissement ostentatoire d’un champ ou domaine de recherche (études postcoloniales) à la métaphysique doctrinale (théories postcoloniales), comme si chaque objet devait générer sa propre théorie, et chaque chercheur enfanter ses propres concepts (opératoires ou non). Or dans la mesure où l’ensemble des pratiques signifiantes étudié ou étudiable dans le cadre des études postcoloniales ne sont que des pratiques déjà répertoriées et étudiées dans d’autres champs d’études (littérature, théâtre, chanson, journalisme, etc.), je vois mal le pourquoi (et surtout le comment) d’une théorie ou de théories postcoloniales (spécifiques). Il n’y pas une théorie chinoise ou chilienne des mathématiques ou de la physique, il y a une ou des théories mathématiques ou physiques sans marques nationales ou ethniques. Une science (molle ou dure) marquée racialement ou localement ne serait plus une science. Si les études postcoloniales ont besoin d’une théorie (postcolonialement marquée) pour exister, mieux vaut laisser sombrer le bateau.

Certes, il faut (re)mettre la littérature au centre des préoccupations. Mais cela ne veut pas dire l’étudier hors contexte, et encore moins dans une perspective unique, réductrice d’analyses socio-historisantes ou psycho-sociologisantes dont les commentaires de Fanon sur Capécia et Maran sont symptomatiques d’un certain mépris (qui est aussi méprise et méconnaissance) du littéraire qui hante trop souvent les études dites postcoloniales. (6) En effet, comment qualifier sinon de méprisants ces propos sur Maran : « […] Jean Veneuse, alias René Maran, n’est plus ni moins qu’un abandonnique noir. Et on le remet à sa place, à sa juste place. C’est un névrosé qui a besoin d’être délivré de ses fantasmes infantiles » ? (Fanon, 1971 : 64). Dans la même foulée réductrice, un autre exemple moins célèbre, mais tout aussi inquiétant, sinon plus, car là c’est tout bêtement la connaissance de l’histoire littéraire ou des corpus qui fait défaut, ce sont les commentaires de Marcela Breton, dans sa préface de Rythm and Revolt: Tales of the Antilles (1995 : xx), sur la naissance d’une littérature dans la Caraïbe :

« Caribbean literature is a twentieth-century literature. Before an autochthonous literature could develop, the Caribbean writer had to free himself of the cultural models imposed by the colonial powers, whether Spanish, French, English or Dutch. While there are examples of an indigenous literature prior to the twentieth century (for example, the Cuban Cirilo Villaverde’s 1882 novel Cecilia Valdes, and, in general, Cuba represents a divergent case), the emergence of a native literature follows the emancipation of the slave, independence from the motherland, widespread education, leading to the appearance of middle class, which, in turn, produces an intellectual class. Jamaican H. G. de Lisser’s Jane’s Career (1913) is frequently cited as the first West Indian novel where the main character is black. The Antillean writer had to learn to locate literary inspiration in his native land and people while also developing a means of expression appropriate to a description of this reality ».

Pour conclure, si comme il est aujourd’hui généralement reconnu, ces textes dits francophones ne le sont que parce qu’écrits en français, ils ne sont pas pour autant exclusivement ou intégralement en français, notamment sous le mode narratif.

Étant textes allogènes (Jonassaint), ils sont hétéroglossiques (Grutman), du moins bilingues ou diglossiques (Mackey, Laroche) d’où ces procès de traduction qui les caractérisent en partie (Khatibi, Jonassaint). Il serait hasardeux de les aborder sans une connaissance minimale des diverses sémiotiques qui les travaillent et qu’ils travaillent. Sémiotiques, notamment celles indigènes et populaires, qui n’ont plutôt d’existence que dans la performance et la furtivité du quotidien. Or, à quelques exceptions près, ce problème fondamental des sémiotiques et des poétiques indigènes en œuvre dans les productions langagières dites postcoloniales semble peu préoccuper la critique qui trop souvent pense que les indigènes n’ont ni savoir ni discours sur leur pratique. Pourtant, si nous apprenions à les lire, les métadiscours indigènes (populaires ou savants) nous enseigneraient tant sur les textes de l’espace francophone. C’est l’argument principal d’un ouvrage en cours, Lecture de la lecture. Littérature francophone et transtextualité, dont un premier état est donné dans mon article, « Sur des lectures de Traversée de la Mangrove de Condé » (2000). En effet, je soutiens que toute lecture d’un texte francophone qui ne se veut pas réductrice doit tenir compte à la fois des sémiotiques allogènes généralement manifestes (langue, genre par exemple) et indigènes plutôt latentes (langues, motifs, anecdotes, personnages historiques ou populaires, rhétoriques, etc.). Autrement dit, pour bien les lire, minimalement on ne peut faire l’économie des relations transtextuelles de ces textes francophones avec d’autres textes de leur espace en langues indigènes ou non. Une telle perspective d’analyse implique bien sûr un recours à la sémiologie, mieux aux sémiologies et autres méthodes d’analyse (comme la socio-critique, la narratologie, la poétique, la génétique textuelle) qui prennent en compte la matérialité en tout sens du texte dans ses divers procès de production/réception.

Enfin, après détours et palabres, il est temps de réaffirmer qu’une nouvelle revue est toujours une bonne chose, et souhaiter longue vie et grand succès à Francophone Postcolonial Studies, mais aussi, à la bonne manière caraïbéenne, remercier Sam Haig et ses amis pour cette invitation à prise de paroles.

 

Pour les formidables étudiants de mon séminaire de 1er cycle de littératures francophones de l’hiver 2003 à Duke University : Jeanne Dewitt, Andrew Furlow, Babz Kariisa, Ji-Myung Kim, Nell Manning, Ljubica Spaskovska, Isabella Stankowski, Katerina Yiannibas.

Durham-New York-Montréal, avril-mai 2003.

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(1) Plus récemment et plu s inquiétant encore est l’article de David Murphy qui semble penser que le questionnement de la colonialité dans les études littéraires serait une invention et une exclusivité de chercheurs de l’espace anglo-américain – voir Murphy, Choosing a Framework: the Limits of French Studies/Francophone Studies/Postcolonial Studies, Francophone Postcolonial Studies, 1.1, 2003, p. 72-80.

(2) Voir entre autres : Aldama, 2002 ; Castro-Gómez, 1998 ; Mignolo, 1996b pour le monde latino-américain ; Appiah, 1991 ; Bawer, 2002 ; Dirlik, 1994 ; Figueira, 2000 ; Kavoori, 1998 ; McClintock, 1992 ; Shohat, 1992 ; Slemon et al., 1995 dans le contexte anglo-américain.

(3) Sur l’importance de cet ouvrage comme texte fondateur des littératures francophones, et d’un contre-discours sur l’hégémonie européenne colonialo-raciste voir Keith L. Walker, Countermodernism and Francophone Literary Culture: the Game of Slipknot (Durham, Duke University, 1999, p. 19-24) ; et la préface de Carolyn Fluehr-Lobban à sa traduction anglaise par Asselin Charles, The Equality of the Human Races (Positivist Anthropology), New York & London, Garland Publishing, 2000, p. xi-xivi.

(4) Pour en savoir plus sur ces « francophonies individuelles » pour reprendre l’expression de Dominique Combe (Poétiques francophones, Paris, Hachette, 1995, p. 12), voir le livre de Robert Jouanny, Singularités francophones ou Choisir d’écrire en français, Paris, PUF, 2000.

(5) Plus qu’un débat entre philosophie et science, ou une guerre France/USA, l’affaire Sokal porte plutôt, il me semble, sur la pertinence ou non des modes d’évaluation en sciences humaines, et l’usage non contrôlé des vocabulaires scientifiques dans les humanités. En ce sens, elle est formatrice, et devrait guider toute entreprise d’édition aujourd’hui. La bibliographie la concernant est abondante tant en français qu’en anglais. Pour une vue d’ensemble, on peut consulter en français Alan Sokal et Jean Bricmont, Impostures intellectuelles, Paris, Éditions Odile Jacob, 1997 ; Yves Jeanneret, L’Affaire Sokal ou la querelle des impostures, Paris, PUF, 1998.

(6) Sur les méprises de Fanon et autres exégètes de Capécia voir l’éloquent article de A. James Arnold, Frantz Fanon, Lafcadio Hearn et la supercherie de « Mayotte Capécia », Revue de littérature comparée, 302, 2002, p. 148-164, dans la foulée de l’imposante recherche de Christiane P. Makward, Mayotte Capécia ou l’Aliénation selon Fanon (1999), et sur les méprises de Fanon comme critique littéraire en général, voir mon article à venir, Contre Fanon.