« Je ne cache pas que j’attends tout d’une nouvelle barbarie. »
Aimé Césaire
« Moi… je ne sais plus parler. »
Arthur Rimbaud
(…)
demain je n’écrirai plus
Je sauterai le papier
Je ferai comme mes Pères
Je crierai seulement
Je crierai d’abord
Je crierai simplement
d'[entre]ailles
quand le lasso se lassera de tourner à vide
au-dessus de calculs ordinaires
sur des cécités
sur une absence d’idée
quand
las les reptants dépêchés
de lacérer à perte une raideur de cité
et s’enrouleront autour de l’absence de feu
quand
la lave lasse d’aller pauvre aux parages
une épure de sectes en sa marge la harcelant
quand la racaille lasse de tourner un mauvais rond
à ne cailler plus qu’un piètre lait
quand tout nous reviendra las de ne plus capturer rien
il nous faudra réinventer la déroutante
il faudra
réouvrir des ventres
appel à la s|eau]vagerie
ce matin ont mal cassé :
la cola
un bref bec fouilleur sur diamant
l’œuf en sa verticale
ce matin a monté :
le sang des petites gens et jusqu’à Ilɛ
et le local lait l’ailé y ayant battu plus de sept stances…
fra[terre]nité
dansons un mouchoir virginal
dansons le clin d’œil du datura qui bascule en moi
dansons m’inonde le coi du monde
dansons ! dansons ! à éprouver une nouvelle fois l’arithmétique
toi tu dis la terre
moi je dis le prolongement de ma chair
et tu crois que je refuserais de mourir vaste ?
vois
le danser l’Immobile c’est danser un Repère
apprends le danser l’intimité le danser l’unité
dansons danser me répands
je dis dansons et voici que je danse un dire irrégulier
et tu oses encore me jeter l’universel à la gueule
à moi qui danse !
n’as-tu pas compris que j’étais l’indistinct ?
dansons ! dansons !
danse la modernité du sauvage
dansons mais dansons juste
dansons mais dansant ô crois-moi je ne m’amuse
fri[vole]
le frais froufrou du suroît
une île y palpite
la pupille je ne sais si elle feint seulement d’être malhabile
un battement de cils à lever plus petit qu’epsilon
un envol de signes ailés des frissons libres
des choses colorées
un exhala de fleurs pilées…
la corolle à courroyer sur un rara très haut
la déroute invalide à cœur de péristyle
l’étamine en son mitan libre…
tourne sept fois large tourne sept fois blanche
puis encore vibre l’île
noir
vibre l’île
blanc
la geste qui poudroie
ses sillons lisses ourlés de l’or d’Euthymènes
les plis en valse qui lui valent le vil nom de papillon…
comm[un]
noué dans un ultime saut de ventre
où surnage un seul nombril
déjà conscient dans l’alphabet de son sang à venir
un roi :
« dis pa-pa dis !
s’il est vrai que la terre est ronde
est-ce l’oiseau qui porte la terre
ou la terre qui porte l’oiseau ? »
vôd[où]n
où qu’on le porte
l’eau
aussi loin qu’on remonte
l’eau
du logoone me lançant haut
du kinkeliba me jetant bas
de l’oiseau me mêlant à la terre
eau rouge
eau verte
kɔ si orixà
kɔ si éwé
cerbères
…vint la rivière
vint la siropière
vint la sorcière
de-venir sur-venir re-venir
vers le jour neuf au ballet de mystères
vain vin d’elefin
quand le moment est à arçonner la serpière
fin de fin de fines feuilles
amà ! vélin à mâcher à mâcher à mâcher…
viens la mère sa paire de seins en bandoulière
viennent les vipères … une rivière de viscères
puis au puits le lait à la mer enfin
‘ styx ! styx ! styx ! ‘
viens le père la main sur le cœur hirsute de bras en croix
en distribution sériaire le cœur hirsute de routes
enfin au carrefour des chairs
vinrent ivres
de venin, de venin, de venin
les chiens du diable sa garde arrière…
rut
il y a comme un et cetera de signes nus
qui nerveusement se bousculent.
Ils disent
la foudroyance de choses à venir…
Les mots poussent
en sagaies de soleil les mots poussent
les mots poussent les anges chutent
il y a un et cetera de mots
un enculement de mots un chapelet de mots
au final, il reste cette rivière de mots
où noyer tous les anges…
« La poésie écrite vaut une fois et ensuite qu’on la détruise. »
Antonin Artaud