Le théâtre du Jeu de Paume, à Aix-en-Provence, a produit en 2013 ce spectacle repris cette année, qui illustre un épisode bien connu des Mille et une nuits. Après le désistement de Charles Tordjman, metteur en scène, Matej Forman, co-directeur avec son frère jumeau d’un théâtre qui allie les marionnettes à des animaux stylisés, le tout dans des décors naïfs, est resté le seul maître à bord. L’univers des frères Forman collant particulièrement bien avec celui de l’enfance, on était curieux de voir cette adaptation d’Aladin.
Le prologue est prometteur : deux boules lumineuses volent lentement au-dessus des spectateurs jusqu’à la scène coupée par plusieurs rangs de rideaux transparents, où les attendent d’autres boules en mouvement. Une caravane de dromadaires (des silhouettes en contreplaqué) traverse la scène. Apparaît la conteuse, Agnès Sourdillon, vêtue à l’orientale. Elle présente au public la marionnette d’Aladin, avant de la jucher sur un autre dromadaire, en trois dimensions celui-ci, qui disparaît bientôt, roulant sur quatre roues de bicyclettes. L’histoire peut alors commencer. Elle se développe sur deux plans : Le récit oral, porté allègrement par A. Sourdillon, est illustré par les créatures concoctées et animées par l’équipe du « Théâtre des frères Forman ». Ces dernières, par leur inventivité, leur fantaisie, font le charme principal du spectacle. C’est ainsi dans le ventre d’un dromadaire que se dissimule la grotte renfermant la fameuse lampe qui donnera à Aladin tout ce qu’il désire ; du coup, c’est une autre marionnette, miniature de la première, qui partira explorer la grotte. Le procédé est reproduit plus tard, lorsque, grâce à sa lampe, Aladin aura séduit la princesse Jasmine. Le château qu’il construit pour elle surgit du corps d’un éléphant, et à nouveau, ce sont deux réductions des marionnettes qui paraderont sur la plus haute tour du château.
La conteuse étant la seule à parler – en dehors d’une voix enregistrée, un peu effrayante (il faut bien qu’un conte fasse peur) qui porte les paroles du magicien ou du génie de la lampe – il revient aux marionnettes de rendre visibles les sentiments d’Aladin et de Jasmine (les mauvaises intentions du magicien, monstre surdimensionné, aux doigts crochus, ne faisant guère de doute). Avouons une certaine déception : le théâtre de marionnettes se répand beaucoup de nos jours et l’on a vu, dans ce genre-là, des prestations bien plus émouvantes. Il y a également quelques temps morts, nourris par une musique assourdissante, qui apparaissent superflus. Mais si tout cela interdit de considérer cet Aladin comme un chef d’œuvre, cela n’empêche nullement de passer un très bon moment et les enfants, premiers destinataires de ce spectacle, qui étaient nombreux dans la salle du Jeu de Paume, étaient à l’évidence ravis.
À Aix-en-Provence du 29 au 31 octobre 2014.
Crédit photos : Irena Vodakova