À la croisée des mondes Mondes européens

Aimer l’étranger dans “L’Amant” de Marguerite Duras et “À la Vitesse d’un baiser sur la peau” de Gaston-Paul Effa

Résumé :

L’étranger est l’écho de l’ailleurs. Il noue parfois des relations sentimentales sur la terre d’accueil, souvent perturbées par le  regard des autres, regard orienté par une mentalité rétrograde. Etudiant le  quotidien des amants dont il retrace au préalable les origines et les reliefs, cet article observe ce phénomène dans A la Vitesse d’un baiser sur la peau de Gaston-Paul Effa et L’Amant de Marguerite Duras. Il montre des obstacles considérables préjudiciables à l’épanouissement de l’amour quand ils ne sont pas révélateurs de considérations essentiellement matérialistes. En revanche, se développent des liens si forts qu’ils rendent toute rupture impossible chez des amants étrangers qui se découvrent l’un grâce à l’autre grâce à leur vie privée commune.

 

INTRODUCTION

La figure de l’étranger constitue un thème de plus en plus récurrent dans la littérature, justifié par les déplacements d’individus d’une région à d’autres. En effet, avec le perfectionnement des moyens de locomotion, l’ouverture des humains sur d’autres univers et les impératifs inhérents à une existence portée vers la rencontre de l’autre, l’on assiste à un intérêt croissant des écrivains pour les relations qui peuvent se tisser entre partenaires issus d’horizons divers. Il en est ainsi de Villaderda et Clémence (Claire Etcherelli, 1971), d’Arezki et Elise (Claire Etcherelli (1964)  ou de Mbaye et Thérèse  (Sembène Ousmane, 1966). L’on comprend que la critique s’intéresse à ce champ, tant il ouvre des perspectives  pertinentes pour l’analyse des rapports entre partenaires de couples mixtes. Un réseau de faits pertinents pour l’étude de la vie privée s’y observe, qui illustre en même temps les marques des mentalités qui se construisent, se renforcent ou s’altèrent du fait des contacts avec l’autre. L’on pourra consulter à cet effet la réflexion de Gilbert Doho (1997) qui, partant des influences ou des rôles de la femme blanche auprès de son conjoint noir, parle de « femme à Nègre », sorte de rampe de lancement pour son mari qui, souvent rencontré au cours de son séjour en Europe, connaîtra des promotions fulgurantes dans sa carrière professionnelle une fois rentré dans son pays d’origine. Mon propos dans le cadre de cet article entend superposer A la Vitesse d’un baiser sur la peau[1] de Gaston-Paul Effa et L’Amant[2] de Marguerite Duras pour y voir un champ où des personnages se côtoient d’abord, nouent ensuite des relations où l’érotisme et les calculs jouent des rôles non négligeables. Il s’agit d’une étude qui campe les couples strictement dans le cadre de leur vécu sans rapport avec les professions qu’ils exercent.  Il est intéressant d’étudier le regard des proches face au quotidien des amants ; celui-ci s’accompagne souvent d’un réflexe sécuritaire pouvant entraîner la manifestation d’une « vie privée statutaire » (Ariès et Duby, 1999).  Parallèlement, c’est le lieu de se demander si les rencontres entre partenaires n’influent pas sur le cours de leurs identités ; cette question suscitera ma curiosité pour leurs réactions face à d’éventuels écueils de nature endogène ou exogène. Au préalable, je restituerai les origines et les reliefs des partenaires tels qu’ils apparaissent dans ce corpus.

 

1. Les protagonistes : leurs origines et leurs reliefs

À la lecture de VBP et A, l’on est marqué par la pluralité raciale qui se dégage de leurs personnages, les principaux venant d’origines diverses. C’est le cas notamment pour les partenaires des relations amoureuses vécues par le Chinois et la petite française dans A d’une part, d’autre part par Hilda et Valère et plus tard Hilda et Victor dans VBP. Il s’agit des personnages initialement inconnus les uns des autres ; ainsi, à l’anonymat des protagonistes dans VBP s’oppose la réputation supposée du chinois de Cholen : « Sa famille vient de la Chine du Nord, de Fou-Chouen […] Il est de cette minorité financière  qui tient tout l’immobilier populaire de la colonie » (A : 44). Seule son auto-présentation lui donne un relief ignoré par la jeune fille qu’il vient de rencontrer : « Il dit qu’il revient de Paris, où il a fait ses études, qu’il habite Sadec lui aussi, justement sur le fleuve, la grande maison avec les grandes terrasses aux balustrades de céramique bleue » (43-44). Sa partenaire est une adolescente âgée de quinze ans et demi au début de leur relation (11, 16 et 24). C’est une Française  originaire du Loir-et-Cher, placée dans une pension d’état à Saigon où elle mange et dort mais prend les cours au-dehors, au lycée français.  Sa mère, une institutrice, dirige l’école des filles à Sadec où elle habite une petite maison de fonction avec ses deux fils. Dans VBP, il s’agit d’un jeune Africain, Valère, qui séduit Hilda, une Française en Alsace. Ici, c’est l’amant qui se trouve en terre étrangère, au pays de sa partenaire qui le comble de ses largesses, y compris quand il décide de s’éloigner d’elle malgré sa réticence ; en témoignent les propos de Hilda ci-après : « Voici un peu d’argent, va à Paris. Je t’aiderai un peu au début. Je t’enverrai des mandats jusqu’à ce que tu trouves du travail, comme les autres étudiants » (VBP : 123).

Pareillement, même si le lecteur de VBP découvre les noms des ascendants d’Hilda, -Mme Bloch et Auguste-, ils ne sont pas pour autant d’origine obscure, tout  comme ces anonymes dont Valère prétend descendre malgré la mythification à laquelle il recourt, valorisant son aïeul Barnabé, son père et son oncle (VBP : 30-32). Elle est Française d’Alsace, descendante d’une famille juive ashkénaze (VBP : 115) ; Valère, quant à lui, vient du peuple Sawa au Cameroun si l’on s’en tient à la langue dans laquelle il s’adresse à sa grand-mère[3].  Il est intéressant de noter que malgré la durée considérable des liens entre Valère et Hilda, celle-ci ne le connaîtra pas, en témoignent les révélations de Victor sur cet ami dont elle a ignoré la conduite depuis qu’elle l’a rencontré.

Il y a deux mouvements en sens contraires : dans VPB, l’homme se déplace alors que dans A, c’est sa partenaire qui est en situation d’étrangère si l’on s’en tient seulement à l’espace géographique, au terroir, même si vivant à Saigon, la narratrice est toujours  dans une colonie française. Dans les deux cas, la Française est issue d’une migration, juive par ses ascendants dans VBP, coloniale par le statut de sa mère directrice d’une école française en Indochine dans A. Une mosaïque de peuples se trouve ainsi réunie, faite de juifs, de Chinois, d’Européens et d’Africains, avec des interactions significatives sur l’amour comme nous le verrons plus tard.

Du point de vue des âges, il y a d’une part un amant jeune, Valère, à peine adulte au moment de sa rencontre avec  Hilda,  une femme de beaucoup plus âgée que lui[4]. Il en sera de même pour Victor, cet autre amant qu’elle aura plus tard après le départ de Valère dont il est d’ailleurs le cousin. A l’inverse, dans A, son double, le Chinois de Cholen, est un homme de loin plus âgé que la Française qu’il rencontre et avec laquelle il entretient quotidiennement des rapports sexuels pendant des mois. Les partenaires rencontrés chez eux sont plus âgés que l’immigré€ aimé(e).

La compagne de l’amant chinois  mène une vie presque en retrait de sa famille, non seulement du fait d’une mère entre désinvolture et excès de libéralisme, mais aussi pour s’éloigner de  son frère aîné, un voyou  qu’elle déteste, ce malgré  sa sympathie pour son petit frère, la seule personne qui compte vraiment pour elle. En fait, sa  rencontre avec le Chinois la sort d’un univers familial hostile, dominé par une violence permanente entre les enfants, sans compter les malheurs d’une mère impuissante face aux scènes de bagarres entre ses deux fils quand ce n’est pas elle-même qui se laisse aller à des brutalités inouïes sur sa fille (A : 71-75). Au contraire, avant de rencontrer Valère, Hilda a toujours vécu  en grande harmonie avec ses parents, sa famille étant réduite à trois membres dans l’espace du roman.

2. Le quotidien des amants et le regard des proches

Dès leur première conversation, l’amante du Chinois n’hésite pas à lui faire part des difficultés de sa famille : « C’est la première fois que nous parlons. Je lui parle de l’existence de mes deux frères. Je dis que nous n’avons pas d’argent. Plus rien » (A : 51). D’ailleurs, plus tard, la narratrice avouera au Chinois qu’elle « le désire avec son argent » (Id.). En dehors des rares confidences qu’ils se font au début,  ils ne se connaîtront que comme acteurs de la jouissance sensuelle, laissant ainsi le cours fécond à l’imagination, se cachant mutuellement jusqu’à leurs noms, que le narrateur occulte en les désignant le plus souvent par des pronoms personnels.  Même au cœur des moments d’intense intimité amoureuse, il y a comme une exigence fondamentale de rester étranger l’un à l’autre par un discours où se lisent le maintien de distanciation et le refus de briser la barrière de l’étrangeté :

Il la regarde tout d’abord comme s’il attendait qu’elle parle, mais elle ne parle pas. Alors il ne bouge pas non plus, il ne la déshabille pas, il dit qu’il l’aime comme un fou, il le dit tout bas. Puis il se tait. Elle ne lui répond pas. Elle pourrait répondre qu’elle ne l’aime pas. Elle ne dit rien. Tout à coup, elle sait, là, à l’instant, elle sait qu’il ne la connaît pas, qu’il ne la connaîtra jamais […] Elle lui dit : je préfèrerais que vous ne m’aimiez pas (A : 47-48).

Cette relation très ambiguë avec le Chinois trouve sa pleine expression dans l’attitude des frères de la jeune amante ; ils profitent à l’excès de ses largesses mais n’ont aucune considération pour lui. Ici, l’amour est dévoyé au profit d’un proxénétisme de fait et réducteur, gastronomiquement rentable et vivant des charmes d’une adolescente livrée ou presque à l’appétit de sa famille sur une terre étrangère. Alors, au lieu de vivre un vrai amour, celle-ci est quotidiennement consommée par un pédophile, dans une relation où sa nymphomanie de circonstance comble la boulimie d’un érotomane peu attiré par d’autres choses : «  C’est un homme qui doit faire beaucoup l’amour, c’est un homme qui a peur, il doit faire beaucoup l’amour pour lutter contre la peur […] Il a l’habitude, c’est ce qu’il fait dans la vie, l’amour, seulement ça » (A : 53-54). Il est un étranger, seule la satisfaction de leur nécessité semble tolérer un contact avec lui, ce qui scandalise la narratrice :

Mes frères dévorent, et ne lui adressent jamais la parole. Ils ne le regardent pas non plus, ils ne peuvent pas le regarder […] Mes frères continuent à dévorer. Ils dévorent comme je n’ai jamais vu dévorer personne nulle part. Il paie. Il compte l’argent. Il le pose dans la soucoupe. Tout le monde regarde. La première fois, je me souviens, il aligne soixante-dix-sept piastres. Ma mère est au bord du fou rire. On se lève pour partir. Pas de merci, de personne. On ne dit jamais merci pour le bon dîner, ni bonjour ni au revoir […] c’est comme s’il n’était pas visible pour eux, comme s’il n’était pas assez dense pour être perçu, vu, entendu par eux  (64-65). 

Ici, c’est l’amant qui offre et est exploité par la belle-famille « parasite », contrairement à ce que nous avons observé avec VBP. Le Chinois paie, quoique convaincu du jeu double de la jeune fille[5]. Là, c’est la Blanche, une Française d’ascendance juive qui est exploitée ; ici, dans A, c’est le Blanc qui exploite le Chinois et le méprise en même temps : « Cela, parce que c’est un Chinois, que ce n’est pas un Blanc » (65). Cette propension à profiter de l’étranger rencontré chez lui poussera jusqu’à la satisfaction des caprices, y compris les plus ruineux comme on le voit chez ces Blancs qui, après des «  dîners fabuleux » (66) dans des grands restaurants chinois à Saigon, voudront aller boire et danser à la Source ; là, ils commandent tous des Martel Perrier qu’ils boivent au point d’en être vite saouls.

De son côté, le Chinois semble particulièrement attiré par l’étranger ; il suffit de noter avec quelle nostalgie il parle « des adorables Parisiennes, des noces, des bombes, ah là là, de la Coupole, de la Rotonde […] de cette existence « épatante » qu’il avait menée pendant deux ans » (A : 45). Avec la jeune française, il se rattrape, récupérant comme par procuration ces Parisiennes dont il fut sevré par un retour précoce sur une instruction venant de son père. Malheureusement, sa partenaire est sacrifiée : à cause de leur relation, elle ne pourra plus se marier à la colonie. Rejetée par les parents du Chinois parce qu’étrangère, elle apparaît face à la diaspora métropolitaine comme une dévergondée dont personne ne voudra (114).

Au vu des exemples étudiés ci-dessus, l’amour sincère apparaît comme expression d’une naïveté vite exploitée par l’étranger profiteur. L’on comprend les réticences de certains parents qui, comme Mme Bloch, dénoncent tout rapprochement naïf avec l’étranger. Réclamant avec insistance que sa fille Hilda rompe avec Valère, elle ne manque pas d’arguments : «  Il lampe même le fond des casseroles. Dès qu’on l’invite, il est  là. Il mange comme quatre ! Et dire qu’ils meurent de faim là-bas. C’est à n’y rien comprendre. Il faut dire qu’il se rattrape ! Il mange pour tous ceux qui meurent de faim chez lui » (VBP : 131). Ici, à la gourmandise de Valère s’ajoute son opportunisme : il est vu par Mme Bloch comme un grotesque profiteur, un parasite ruineux et sans scrupules :

Il se verse un grand coup de bière, il a même deux canettes à la main. Et le voilà à l’aise. Faites comme chez vous ! Il bâfre ! La choucroute, le baekoefe, rien ne lui fait peur. Il a une sacrée descente ! Tout ce qu’il mange, ça fait peur ! A la fin, il ne nous restera plus le sou ! Aussitôt qu’il arrive, il passe à table. C’est Hilda qui fait le service. Il cause plus, lui. Il ne dit plus rien à personne. Il mange (128).

Au regard de la différence raciale qui existe entre les amants, les deux familles repoussent l’idée d’un éventuel mariage ente eux : Parlant de son père, le Chinois affirme : « Il refusera le mariage de son fils avec la petite prostituée blanche du poste de Sadec (A : 45). Parallèlement, Mme Bloch s’oppose à l’idée d’un mariage entre Hilda et Valère, effrayée en cela par la perspective d’avoir des petits- fils de sang africain. En effet, parlant à son mari, elle dit : « Tu t’imagines, s’ils font un gosse, ton nom serait perdu, déjà que tu n’as eu qu’une fille. Comme si ça ne suffisait pas, tes petits-fils s’appelleraient Mamadou ou Diallo ! » (VBP : 128).

Dans ces propos se lit la peur de disparaître, l’étranger incarnant une menace pour la survie de l’individu ; au-delà, c’est de la  survie du groupe qu’il est question. Alors, le patronyme qui en est l’indicateur est ici évoqué tel un bouclier contre le danger de  l’étranger. Ce rejet de principe d’une union sérieuse avec l’étranger qui paradoxalement semble bien engagé pour un mariage, nous l’observons aussi dans A, à quelque nuance près. Le Chinois de Cholen rencontre et aime la Française étrangère ; il satisfait les besoins vitaux de sa « belle –famille » qui ne semble le tolérer que comme vache à traire, sans plus, et la narratrice de confesser :

Cela parce qu’il est à mes pieds, qu’il est porté en principe que je ne l’aime pas, que je suis avec lui pour l’argent, que je ne peux pas l’aimer, que c’est impossible, qu’il pourrait tout supporter de moi sans être au bout de cet amour. Cela, parce qu’il est un Chinois, que ce n’est pas un Blanc (A : 65).

Dans les deux romans, c’est de l’indigène que vient l’amour sincère, fait d’attentions et de faveurs à l’égard de l’immigré, comme l’illustrent les cas de Hilda et celui du Chinois ;  il y a comme l’expression d’une hospitalité affective qui se grefferait à la sensibilité vis-à-vis de l’étranger en difficulté. Malheureusement, ce sentiment est combattu par les parents de l’indigène aimant à l’image de Mme Bloch ou du père du Chinois. Toutefois, alors que Hilda ignore les incessants appels à la rupture proférés par sa mère, le Chinois  n’y arrive pas, d’où le constat de son amante : « Il n’a pas la force de m’aimer contre son père, de me prendre, de m’emmener » (A : 63). L’explication de cette double réalité résiderait dans la capacité de celui/celle qui aime à se prendre matériellement en charge. Autant Hilda peut vivre de ses propres revenus, autant le Chinois dépend de la grosse fortune de son père, ce que reconnaît son amie : « Sa servilité, c’est l’argent de son père » (Ibid.).

Parallèlement, l’étranger aimé dans les deux romans profite des largesses de l’hôte aimant, quitte à y associer ses parents comme dans A. On le voit, les difficultés matérielles du partenaire étranger semblent prévaloir, dictant une posture qui, même dans le contexte amoureux, entretient le mystère sur soi et garde l’esprit rivé sur les potentialités de l’autre à palier au manque. C’est de cette façon que la petite Française semble attentive aux propos du Chinois de Cholen : « Elle écoutait, attentive aux renseignements de son discours qui débouchaient sur la richesse, qui auraient pu donner une indication sur le montant des millions » (A : 45). Comme Valère, elle est pauvre et espère recevoir de cet amant une amélioration nette de ses conditions d’existence et se confie au lecteur : « Je ne ferai plus jamais le voyage en car pour indigènes. Dorénavant, j’aurai une limousine pour aller au lycée et me ramener à la maison Je dînerai dans les endroits les plus élégants de la ville » (44).  Les confidences de Hilda sont assez significatives à ce propos : «  Dès que Valère rentrait, je lui pardonnais tout. Et lui profitait de mes faiblesses » (VBP : 115). L’on peut en déduire qu’il n’y a pas à proprement parler d’amour venant de l’immigré, tant les personnages incarnant ce statut, Valère et la jeune Française, apparaissent comme des opportunistes plus soucieux de satisfaire des nécessités matérielles éprouvées sur le pays d’accueil que de répondre à des besoins d’ordre affectif. L’égoïsme, le calcul, parfois accompagnés de cynisme sinon de mépris, relèguent au second plan la sincérité et l’appel à la réciprocité que commande la générosité du partenaire. Il faut noter cependant l’attitude de Victor, autre immigré, visiblement plus attentionné et  moins superficiel en amour vis-à-vis de Hilda : il profite lui aussi de la générosité de celle-ci dans un contexte où, échaudée par ses déconvenues avec Valère, elle semble se limiter à des actes de surface dictés par la prudence. Il s’en rend compte d’ailleurs :

De toute évidence, l’amour en elle n’était pas spontané comme en moi et il entrait, dans sa conduite à mon égard, une indubitable bien que mystérieuse volonté de me contenter, de me plaire, parfois même de me leurrer. Mais j’acceptais cette bonne volonté comme une preuve de son attachement, comme un désir de se détacher totalement de Valère (205).

En revanche, il est intéressant de voir combien l’indigène aimant est foudroyé par son amour pour l’étranger : autant Hilda souffre des absences ou des coups de caprice de Valère, autant le Chinois tremble de peur en compagnie de la jeune Française qu’il « aime comme un fou » (A : 47). Son silence et sa promptitude à satisfaire tous les caprices des parents de celle-ci sont révélateurs du martyre qu’il éprouve en rapport avec son amour pour cette étrangère, rappelant celui de Hilda face aux congénères de Valère[6] (VBP : 103-104) : c’est une souffrance consentie tel un sacrifice de soi pour l’étranger aimé, même quand celui-ci en tire une sorte de délectation à l’image de Valère ou des frères de la jeune Française. L’on comprend alors les réflexions de Hilda quand elle absout son ami de tout, justifiant au passage ses manquements (105-108) qui paradoxalement lui ôtent toute sanction :

J’étais étouffée de sanglots […] depuis la  minute où il était entré et où il s’était comme abattu contre moi, ivre, je n’avais su que demeurer près de lui, sans pouvoir un seul instant retenir mes larmes, ma main posée sur son épaule comme pour l’apaiser ou lui faire sentir simplement que j’étais là et que j’avais de la peine. […] Nous nous serrâmes l’un contre l’autre […] J’étais si éplorée que je ne pouvais dire une parole, et je ne pus que l’étreindre (107-108).

Il y a en cette partenaire un divorce entre son esprit tenté par une révolution contre cet immigré et son corps, plutôt paradoxalement fait de soumission. La résultante, c’est cette étreinte, sorte de vibration dont l’intensité est l’écho d’une complainte de femme mal aimée. Mentalement en posture de duplicité apparente, mi-révoltée mi-consentante, elle laisse le soin à ses sens  de trancher. Alors, victime résignée, elle peut s’abandonner ou même, paradoxalement, étreindre l’être dont le comportement lui commande en sourdine de le repousser. Cette étrange « étreinte de la pieuvre »[7] marque la fusion qu’une expression surréaliste de l’amour rend possible. Hilda est autre, comme transfigurée par son affection pour cet étranger qu’elle a rencontrée par hasard.

3. Aimer l’étranger : entre réflexe sécuritaire et vie privée statutaire

Il existe dans le comportement de certains personnages une relation faite d’ambiguïté, liée à leur signalement dans l’ordre social comme une attribution dont ils s’acquittent, comme un statut qu’ils entendent assumer, sans que ce soit nécessairement de l’amour avec ses exigences. Analysant les comportements de certains individus dans la société, Ariès et Duby parlent de « vie privée statutaire », définie comme « celle que l’homme « arrivé », socialement reconnu –politicien, acteur, homme politique[8] –, entend médiatiser» (1999 : 550). Il est à cet égard significatif que le Chinois aime cette jeune fille dont il sait pertinemment qu’elle ne l’aime pas, qu’elle ne l’aimera jamais : il y a chez lui la prise en compte d’un statut qu’il s’est imposé et qu’il assume, satisfaisant les besoins de l’adolescente et des siens, faisant avec elle l’amour au quotidien en répétant chaque fois le rituel de la laver avec de l’eau des jarres, lui parlant très peu ou pas du tout, se contentant de lui/se procurer de la jouissance, sans demander plus. Cette attitude rappelle celle du vieil Auguste, un ancien colon français en qui son  séjour au Mali a généré des paradoxes considérables. Nostalgique de De Gaulle, il « pestait contre tous ces étrangers qui envahissaient son pays […] Mais il ne faut pas croire, Auguste aimait bien les étrangers » (VBP : 125). Tel un chef de tribu assiégé, ce vieillard se sent comme un devoir de résistance vis-à-vis du péril représenté par l’intrusion dans son pays des étrangers, le danger qu’ils incarnent consistant en leur présence sur son territoire. S’il aime les étrangers, c’est dans ses efforts de leur donner un cadre ou une qualité de vie susceptibles de les contenir chez eux. C’est sans doute plus pour se donner bonne image : du coup, ses marques d’attention apparaissent comme un leurre, entretenant chez leur bénéficiaire l’illusion d’être aimé au point de pouvoir en demander plus. Le refus de faire plus, sous forme de rupture des envois d’argent, constitue la marque d’un principe fondateur d’idéologie à la fois sécuritaire pour la France et néfaste au projet d’émigration de l’étranger. Son passé de colon semble incompatible avec un amour fusionnel entre un Français et un étranger ; d’où ses appréhensions fondées sur le fait qu’à ses yeux, tout étranger est un envahisseur, donc dangereux. Alors, se demandera-t-on, comment ce personnage, visiblement convaincu de la supériorité du colon sur les colonisés, en arrive-t-il à redouter l’arrivée de ceux-ci sur sa terre ? En fait, son apparente générosité cache sa volonté de paraître, révélant un comportement purement statutaire à ne pas confondre avec l’amour dès lors qu’il exclut toute hospitalité au profit de ses prétendus bénéficiaires.

 

4. L’impossible rupture 

Tout semble concourir à la séparation des amants : la « trahison » de Valère révélée par Victor (VBP : 177-179), l’opposition des parents mi-xénophobes mi-conservateurs (A : 102 et VBP : 167-168), la peur des conséquences judiciaires qu’entraînerait une action contre la pédophilie ou le détournement des mineurs (A : 131) comme la crainte du regard des autres (VBP : 109). Cependant, leurs attitudes révèlent autre chose qu’il est important d’analyser dans la mesure où elles concernent des partenaires d’origines étrangères.

Les oppositions à ces amours, loin de les fragiliser, les renforcent. Le Chinois vient d’essuyer un refus ferme de son père de qui il a sollicité avec insistance la possibilité de laisser libre cours à sa « passion », à « cet amour fou de la petite fille blanche » (A : 102) ; sans donner de raisons, celle-ci lui déclarera plus tard être de l’avis de ce père. La rupture s’offre comme la voie inévitable, notamment lorsque  les propos de la partenaire ne laissent aucun espoir : « Je refusais de rester avec lui » (103). Ainsi peut s’envisager le futur, à la fois triste et souhaitable, mal nécessaire dont l’amant malheureux se console :

L’homme de Cholen sait que la décision de son père et celle de l’enfant sont les mêmes et qu’elles sont sans appel. A un moindre degré, il commence à entendre que le départ qui le séparera d’elle est la chance de leur histoire. Que celle-ci n’est pas la sorte qu’il faut pour être mariée, qu’elle se sauverait de tout mariage, qu’il faudra l’abandonner, l’oublier, la redonner aux Blancs, à ses frères (A : 119).

La nécessité de rompre est d’autant plus forte qu’elle est suggérée par la partenaire, en paroles comme dans les actes ; c’est ce qui arrive aussi à Hilda quand Valère la quitte pour Paris. Elle pensera à la rupture davantage en écoutant Victor,  d’où le grand ménage qu’elle engage en vue d’éliminer systématiquement toutes les traces laissées par Valère dans sa chambre : cartes, draps, matelas, entre autres, elle « ne supporte plus l’odeur du nègre dans la maison » (VBP : 154).  Pourtant, peu après, en dépit d’un flirt consenti avec Victor, perceptible comme une vengeance contre Valère dont elle veut chasser à jamais la mémoire, elle avouera : « Décidément, je ne m’y faisais pas, à son absence » (183). Ceci rappelle le paradoxe visible dans l’attitude des amants chez Duras : « On avait décidé de ne plus se voir mais ce n’était pas possible, ça n’avait pas été possible. Chaque soir, je le retrouvais devant le lycée dans son automobile  noire » (A : 134).

Il est possible, dès lors, d’établir que l’interdit dont est frappé l’amour avec l’étranger ne tient qu’autant que le projet d’un mariage est en vue. Sinon, il devient difficile de comprendre le malaise de Mme Bloch une fois Valère parti : elle reproche à sa fille –dont elle a tenté d’éloigner cet immigré d’ailleurs- de l’avoir laissé filer à Paris (VBP : 167). Les parents semblent bien s’accommoder des relations amoureuses sans lendemain, confinant le partenaire étranger aux rôles de supports d’appoint, source de solutions aux besoins matériels qu’ils éprouveraient, d’où l’inutilité de cet étranger qui ne rapporterait rien comme Valère ou très peu comme Victor ; de là, en revanche, la tolérance minimale pour le Chinois, ce fils de milliardaire, même quand la réputation de la famille s’en trouverait ternie ou l’avenir de la fille compromis[9]. Parallèlement, l’étranger aimé pauvre prend la figure de « nègre de service » (VBP : 99 et 111), de stabilisateur psychologique, sorte d’ouvrier des sens ou du sexe après lequel court Hilda en cédant tour à tour à Valère et à Victor, le  cousin de celui-ci : « C’était sûr, c’était certain à présent, et tout le monde le savait. Hilda s’était trouvé un autre nègre » (VBP : 213). Le Chinois de Cholen remplit cette double mission, justifiant sans doute les pleurs de la petite Française pendant qu’elle quitte l’Indochine pour la France : « Elle avait pleuré. Elle l’avait fait sans montrer ses larmes, parce qu’il était Chinois et qu’on ne devait pas pleurer ce genre d’amants » (A : 135). Du coup, il apparaît comme une solution d’appoint à laquelle l’on a  eu recours en situation difficile : il est à oublier dès que possible. L’on peut comprendre que la nécessité matérielle disparaît avec la figure de l’étranger aimé.

Au contraire, celui-ci reste, imposé par le souvenir, plaçant l’autre dans la posture paradoxale de l’être qui se souvient quand il/elle veut oublier, comme quand Hilda affirme, à propos de Valère : « Je n’aurais qu’à me décider, une fois pour toutes, à ne voir en lui qu’un étranger, le parfait étranger qu’il m’était » (VBP : 113-114). Elle se rendra à cette évidence : « Dommage qu’on ne puisse pas virer les souvenirs » (154). Décidément, elle apparaît comme une « femme-à-nègre» (Doho, 1997 : 195), d’où la facilité avec laquelle elle se donne à Victor après le départ de Valère, comme par peur d’effacer ce passé désormais fragilisé par le départ de Valère. Le souvenir, triomphateur, domine même la vie du couple que le Chinois forme plus tard sous la contrainte de son père avec une Chinoise, elle aussi héritière d’une riche famille de Fou-Chouen, allant jusqu’à inhiber la conscience de son devoir :

Il a dû être longtemps à ne pas pouvoir être avec elle, à ne pas arriver à lui donner l’héritier des fortunes. Le souvenir de la petite blanche devait être là, couché, le corps, là, en travers du lit. Elle a dû rester longtemps la souveraine de son désir, la référence personnelle à l’émotion, à l’immensité de la tendresse, à la sombre et terrible profondeur charnelle. Puis le jour est arrivé où ça a dû être possible. Celui justement où le désir de la petite blanche devait être tel, intenable à un tel point qu’il aurait pu en retrouver son image entière comme dans une grande et forte fièvre et pénétrer l’autre femme de ce désir d’elle, l’enfant blanche. Il avait dû s’être retrouvé par le mensonge, au-dedans de cette femme et, par le mensonge, faire ce  que les familles, le Ciel, les ancêtres du Nord attendaient de lui, à savoir l’héritier du nom (A : 140-141).

Ce souvenir défie la distance et les barrières de race, renouvelant au passage des inquiétudes ou des assurances ; en témoignent le désarroi de Hilda quand elle apprend plus tard l’hospitalisation de Valère, trouvé à moitié noyé ou les propos de l’homme de Cholen disant au téléphone à la Française : « que c’était comme avant, qu’il ne pourrait jamais cesser de l’aimer, qu’il l’aimerait jusqu’à sa mort » (141). La fidélité du Chinois est le pendant de celle de Hilda, corollaire d’un amour sincère ; en revanche, l’attitude de Valère, faite de calculs matérialistes, rappelle celle de la jeune française en colonie, moins prompte à conserver pour longtemps une relation pas essentiellement affective. Hilda s’est laissé bercer par un amour fallacieux qui masquait les calculs d’un gigolo (111) malgré les persistantes mises en garde de sa mère. Son attachement à Victor apparaît comme une vengeance qu’elle consomme intensément, contre cet enchanteur qu’elle a laissé filer pour Paris, qu’ensuite elle a continué à entretenir par des envois d’argent. Toutefois, en fin de compte, quoique vivant avec Victor, elle ne peut rompre avec le souvenir de Valère, écho sonore d’un amour qu’elle a du mal à oublier et qui retentit dans son esprit comme la musique classique qu’il écoutait : « J’ai l’impression que tout en moi remonte, la Septième Symphonie de Schubert, les Concertos brandebourgeois de Bach, le Concerto pour clarinette de Mozart et  surtout L’Oiseau de feu de Stravinski » (VBP, 223-224).

Comme dans A, c’est l’amant qui dans VBP est auteur du dernier message en direction de sa partenaire, quoique avec un canal de communication décalé : le Chinois de Cholen téléphone, optant ainsi pour le direct, alors que Valère envoie une lettre qui restera d’ailleurs sans réponse de Hilda. Dès lors, le lecteur remarque que les esprits des partenaires restent connectés ; curieuse posture pour des êtres dont les corps, à travers les sens, ont été souvent les expressions les plus éloquentes de leurs unions. Il y a ici comme une revanche du sentiment sur ce qui apparaît comme la barrière infranchissable des préjugés dès qu’entrent en scène des considérations étrangères à l’amour véritable, dénué de tout calcul.

 

 CONCLUSION

Les migrations s’offrent à la perception des relations troubles entre étrangers qui tantôt s’épanouissent mutuellement, tantôt développent des attitudes faites de xénophobie. Il s’en dégage alors des calculs, souvent dictés par des considérations matérialistes ou économiques quand des préoccupations liées à la survie de la pureté ne sont pas prises en compte. Toutefois, il est intéressant de noter la forte disponibilité des jeunes générations à s’ouvrir aux autres, à l’étranger, contrairement au conservatisme des vieux manifestement hantés par des appréhensions nourries à la sève de mentalités plutôt rétrogrades. Leurs préjugés, les complexes dont ils font l’étalage ont du mal à tenir face à de jeunes partenaires de la relation amoureuse. Ceux-ci sont plus soucieux de se définir ou de satisfaire aux exigences vitales qu’impose leur insertion ailleurs ; de même  leur terroir d’origine  et les contingences d’une société de plus en plus instable les contraignent à s’adapter à l’exigence de la diversité caractéristique d’un monde de plus en plus marqué par la migration. En conséquence, des sympathies fortes peuvent s’établir autour des produits culturels, bravant les barrières de race ou de nationalité, restituant aux êtres concernés leur statut de citoyens du monde. L’étranger devient alors, par la magie de l’amour, la clé de l’énigme pour l’Homme en quête de sa quiddité : il lui assure des réponses aux préoccupations matérielles en même temps qu’il l’aide à se révéler aux autres comme à soi. L’on comprend pourquoi, en dépit des apparences d’un jeu intéressé observables chez quelques partenaires ou chez leurs proches, les obstacles à l’amour de l’autre venu d’ailleurs ou rencontré chez lui s’effacent et, même réduit au souvenir, ce sentiment reste vivace sinon imperturbable. Ainsi, Valère réalise qu’ « entre le Blanc et le Noir, il pouvait n’y avoir pas d’hiatus, et l’amour le plus charnel pouvait être aussi le plus tendre, le plus sensuel » (VBP : 46). Avec ce constat disparaît la méfiance millénaire suscitée par l’inconnu, l’étranger ou celui qui vient de loin décrite par Jean Delumeau (1978).

 

 


[1] Gaston-Paul Effa, A la Vitesse d’un baiser sur la peau, Paris, Anne Carrière, 2007 ; ce titre sera désormais remplacé par VBP.

[2] Marguerite Duras, L’Amant, Paris, Minuit, 2000 ; ce titre sera désormais remplacé par A.

[3] Quand il lui parlait, il l’appelait « de tous ces doux noms, ces noms meurtris, du fond de [ses] os, de [son] sang, de [son] thorax, qui montaient vers elle : mamie dodi, mon petit paquet de cendres, a  nyango ya nongo dongo, ma petite fumée, enveloppe-moi, mami mudi mu kolo !  »(VBP : 118).

[4]. « Hilda n’était pas laide, mais elle avait l’âge de ma mère » (VBP : 44).

[5] . Dès la première rencontre dans la garçonnière qu’il loue, « il lui dit que déjà il sait qu’elle ne l’aimera  jamais » (A : 48).

[6] . Ceux-ci n’hésitent pas à manquer de respect à cette femme qui n’est là que par amour pour Valère, et elle en rend compte, interprétant leurs gestes et regards : « C’était comme si  leurs paroles me dépouillaient, me dévêtaient, comme on ôte sa peau à un fruit dont on ne peut avaler que la pulpe, tandis que leur regard […] m’atteignait aussi plus directement, telle une insulte. « Hé, toi, la Blanche, là-bas ! », disaient-ils quand ils avaient un peu bu […] Ca me faisait bouillir. Je transpirais comme un crapaud, j’en étouffais de rage, je l’aurais bien planté là avec sa smala ! » (VBP : 103-104).

« [7] L’Etreinte de la pieuvre » est un film interprété par Ben Wilson et Neva Gerber, cité par André Breton, « Nadja », Œuvres complètes, Paris, Bibliothèque de la Pléiade, Gallimard, 1988, p. 663.

[8] . Nous ajoutons à cette liste le colon ou le richissime amant qui, mus comme par un code établi ou par un rituel, posent des actes  perceptibles comme des expressions d’amour, mais sans incidence véritable.

[9] . La mère de la petite Française sait que sa fille ne pourra plus se marier  en colonie parce que tout le monde est au courant de ses relations avec le Chinois ; elle souhaite que cette relation n’ait pas d’autre mobile que l’argent de cet étranger (A : 114).

 

RĖFĖRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

1-    ARIES, Philippe et DUBY, Georges (1999), Histoire de la vie privée. De la Première Guerre mondiale à nos jours, Paris, Seuil.

2-    AUREVILLY, Barbey d’Aurevilly , (1972),  Les diaboliques, Paris, Gallimard.

3-     BRETON, André (1937), L’Amour fou, Paris, Gallimard, Paris, NRF.

4-    DELUMEAU, Jean (1978), La Peur en Occident (XVIe – XVIIIe siècles), Paris, Fayard.

5-    DOHO, Gilbert (1997), « Femme-à-nègre » ou conscience de tracteur en post-colonie », Ecritures VII. Le Regard de l’autre : Afrique-Europe au XXème siècle, Yaoundé, Clé.

6-    DURAS, Marguerite (2000), L’Amant, Paris, Minuit.

7-    EFFA, Gaston –Paul (2007), A la Vitesse d’un  baiser sur la peau, Paris, Anne Carrière.

8-    ETCHERELLI, Claire (1967), Elise ou la vraie vie, Paris, Denoël.

9-    ETCHERELLI, Claire (1971), A propos de Clémence, Paris, Denoël.

10-   OUSMANE, Socé (1966), Le Mandat, Paris, Présence Africaine

11-  WILSON, Ben et  GERBER, Neva, « L’Etreinte de la pieuvre », cité par André Breton, « Nadja », Œuvres complètes, Paris, Bibliothèque de la Pléiade, Gallimard, 1988, p. 663.