Mondes caribéens

Aimé Césaire : Métamorphose et quête de l’universel

…et les Nègres vont cherchant dans la poussière – à leur oreille à pleins poumons les pierres précieuses chantant – les échardes dont on fait le mica dont on fait les lunes et l’ardoise lamelleuse dont les sorciers font l’intime férocité des étoiles.

       (Aimé Césaire Couteaux midi, Soleil cou coupé)

 

Pour moi qu’on me serre la jambe
je rends une forêt de lianes
Qu’on me pende par les ongles
                                         je pisse un chameau portant un pape et je m’évanouis en une
rangée de ficus qui très proprement enserrent l’intrus et l’étranglent dans un beau balancement tropical
La faiblesse de beaucoup d’hommes est qu’ils ne savent pas devenir ni une pierre ni
un arbre
Pour moi je m’installe parfois des mèches soufrées entre mes doigts de boa pour l’unique plaisir de m’enflammer en feuilles neuves de poinsettias[1] tout le soir
rouges et verts tremblant au vent
comme dans ma gorge notre aurore[2]

 

Nous entrons de plain-pied dans le corps de cette étude avec ce poème dont nous aimons la sombre alacrité avec laquelle Aimé Césaire ouvre toutes grandes les écluses de la métamorphose tellurique. Le poète se défait avec ivresse, de sa défroque humaine et raisonnable pour devenir, en une étourdissante sarabande, une végétation profuse de lianes de poinsettias, de ficus, d’arbre, une substance minérale pierreuse, deux oiseaux (le pape et le chameau)[3], un serpent (le boa). En fait, nous assistons à une surréelle scène de supplice moyenâgeux subi par le poète en rêve, soumis à la question (d’où le titre), avec le brodequin qui broie les jambes, l’arrachement vif des ongles et l’étranglement lent par le figuier maudit (l’aralie, de l’espèce ficus), cette plante tropicale croissant sur un arbre-hôte jusqu’à l’étouffer.

Cette souffrance d’enfer éveille soudain un cycle métamorphosant où le poète pisse un chameau portant un pape et perd connaissance, étouffé par le ficus. Le supplicié rageur appelle ardemment la métamorphose avec des méches inflammables qui, le consumant tout entier, le conduiront, devenu feuilles neuves de poinsettias, au cœur d’un végétalisme porteur d’aurore. Au centre de gravité du poème, le célèbre aphorisme :

La faiblesse de beaucoup d’hommes est qu’ils ne savent pas devenir ni une pierre ni un arbre

Nous sommes au cœur de la métamorphose césairienne et cette métamorphose est une évasion. Le poète s’auto-détruit par la flamme purificatrice pour l’unique plaisir de s’évader d’un monde où il ne se reconnaît plus – image du phénix qui se consume dans les flammes pour renaître triomphant avec, dans sa gorge, une aurore.

La poésie césairienne, tant les images en sont profuses, semble entièrement gouvernée par l’esthétique de la métamorphose. Et la première interrogation qui vient à l’esprit est : pourquoi la métamorphose ? Pourquoi le poète recherche-t-il obstinément à s’évader de sa forme charnelle pour réapparaître sous des formes nouvelles étrangères à sa condition humaine ?

Le poète semble nous en donner la raison. Écoutons-le :

À la base de la connaissance poétique, une étonnante mobilisation de toutes les forces humaines et cosmiques […] Autour du poème qui va se faire, le tourbillon précieux : le moi, le soi, le monde […] Tout à droit à la vie. Tout est appelé. Tout attend […] C’est ici l’occasion de rappeler que cet inconscient à quoi fait appel toute vraie poésie est le réceptacle des parentés qui, originelles, nous unissent à la nature. En nous l’homme de tous les temps. En nous, tous les hommes. En nous, l’animal, le végétal, le minéral. L’homme n’est pas seulement homme. Il est univers[4] .[5]

Le poète nous donne la réponse : l’homme n’est pas seulement homme, il est univers . Cette profession de foi fondamentale ouvre l’univers à l’homme par la voie d’une glorieuse métamorphose. Nous comprenons mieux alors l’attraction magnétique qu’exerce le concept de l’universel sur la conscience du poète. L’homme noir « qui a bu la coupe d’amertume jusqu’à la lie »[6] rêve de liberté en désertant la blessure sacrée[7] qui, pendant trois siècles a étouffé sa conscience et, purifié des stigmates honteux que l’Histoire esclavagiste et colonisatrice a gravés dans sa mémoire, il clame son ressentiment :

Que de sang dans ma mémoire ! Dans ma mémoire sont des lagunes. Elles sont
couvertes de têtes de morts […]
Ma mémoire est entourée de sang. Ma mémoire a sa ceinture de cadavres !
[…] Faites-moi commissaire de son sang
Faites-moi dépositaire de son ressentiment. (Cahier d’un retour au pays natal)

Cette libération se fait par l’évasion vers l’universel avec l’arme miraculeuse du Verbe, porté au rouge par la rancune et le ressentiment :

… c’est la rancœur des mots qui nous guide
leur odeur perfide
                   (bavure faite de l’intime amitié de nos blessures comme leur rage n’était que la recristallisation                       d’incendies de ghettos)
[…] et l’atroce rancune de salive ravalée du ressac

(Sentiments et ressentiments des mots)

 

La métamorphose évasion

Ainsi la poésie césairienne est habitée par la quête insatiable de l’universel. Cette quête obéit à la loi morale que s’est fixée le poète de retrouver le legs ancestral et qui apparaît avec une aveuglante clarté dans toute l’œuvre : retrouver par le saut dans l’universel

« son enfance ensevelie, trahie, et l’enfance de sa race et l’appel de la terre, comme le fourmillement des instincts et l’indivisible simplicité de la nature, comme le pur legs de ses ancêtres… » (J.P. Sartre, L’Orphée noir, p.XXXIV)

La poésie césairienne est une poésie de rupture, une extrusion de l’être blessé vers les mirages attendus de la métamorphose tellurique. Ce jaillissement de l’être hors de sa carcasse charnelle a été aussi perçu par Jean-Paul Sartre (L’Orphée noir, p.XXXIV) :

« Césaire… végétalise, animalise la terre, le ciel et les pierres. Plus exactement, sa poésie est un accouplement perpétuel de femmes et d’hommes métamorphosés en animaux, en végétaux, en pierres, avec des pierres, des plantes et des bêtes métamorphosées en hommes… »

Comment s’exprime la métamorphose césairienne ?

L’essor de fuite, la projection vers l’universel, s’exprime par plusieurs types d’incarnation : tellurique, marine, minérale, végétale, animale. Seuls les quatre premiers cas seront envisagés car l’incarnation animale est un sujet d’une prodigieuse densité dépassant le cadre de notre texte.

 

La métamorphose tellurique

Je suis un homme de terre, de montagne et de feu…[8]

Ainsi se définit le poète qui trouve dans la métamorphose tellurique la transmutation génératrice de puissance et de vigueur. La métamorphose chtonienne tellurique du poète se déploie dans le chaos d’une nature bouleversée où les règnes sont indiscernables, emmêlés les uns aux autres en un lacis suffocant ; les collines sont animalisées, elles ont des épaules musculaires, aquatiques, végétales, le ciel est doté d’un monstrueux thorax et l’homme se réveille panthère, au sein d’un magma tellurique échevelé :

Et les collines se soulevèrent de leurs épaules grêles, de leurs épaules sans paille, de leurs épaules d’eau jaune, de terre noire, de nénuphar torrentiel, la poitrine trois fois horrible du ciel tenace…
…je refis connaissance avec le connu, l’animal, l’eau, l’arbre, la montagne…
Je me réveillai panthère avec de brusques colères... (Histoire de vivre)

En fait, le poème Histoire de vivre (récit) est la narration, comme l’indique le sous-titre, d’un cyclone qui ravagea Fort-de-France en 1941.

Le poème Bucolique (Ferrements) met en scène une bête-volcan, étrange image de métamorphose tellurique :

… la terre se pousse comme une crinière, vire en manœuvrant sa tête si bien huilée de poulpe… puis se précipite en un vol ténébreux de roches et de météores, les chevaux, les cavaliers, et les maisons… une colline, bon berger roux, qui, d’un bambou phosphorescent pousse à la mer un haut troupeau de temples frissonnants et de villes.

Ces vers sont animés d’une prodigieuse dynamique jaillissante, magma lacis enchevêtré où s’emmêlent la terre, un cheval, un poulpe, un troupeau de bêtes, des cavaliers, des roches, des météores. Cette scène de cataclysme métamorphique évoque le volcan de la Montagne Pelée dont l’éruption catastrophique du 8 mai 1902, détruisit la ville de Saint-Pierre.

La métamorphose tellurique nous gratifie parfois d’étranges scènes de dialogue entre le poète et son île, tous deux métamorphosés, situation qu’évoque le poème Rocher de la femme endormie[9].

La transmutation chtonienne tellurique d’Aimé Césaire se déploie dans le faste naturel de l’un des plus beaux paysages de la Martinique, le rocher du Diamant et la Montagne de la femme couchée (le morne Larcher), à la pointe sud de l’île.

Rescapée rescapée
C’est toi la retombée
D’un festin de volcans
D’un tourbillon de lucioles
D’une fusée de fleurs d’une fureur de rêves…
… je la vois qui bat des paupières
Histoire de m’avertir qu’elle comprend mes signaux
Qui sont d’ailleurs en détresse des chutes de soleil…
… les siens je crois bien être le seul à les capter encore
Plus d’une fois j’ai enhardi la vague
À franchir la limite qui nous sépare toujours…
… Alors quel oiseau sacrificiel aujourd’hui
Te dépêcher
Rescapée rescapée
Toi exil mien et reine des décombres
Fantôme toujours inapte à parfaire ton royaume

 

Dialogue tendre et pathétique entre deux métamorphoses, celle du poète transmuté en Rocher du Diamant et celle de l’Île Martinique incarnée par le morne Larcher, la Montagne de la femme couchée. Le poète ainsi pétrifié interpelle son île somnolente et engourdie dans le relief paresseux de la Montagne séparée du Rocher par un étroit bras de mer. La Martinique rescapée… retombée d’un festin de volcans… , assoupie, trop résignée à son sort au gré du poète qui se sent en exil dans son île natale … reine des décombres / Fantôme toujours inapte à parfaire ton royaume…

Climat de profonde exténuation où les symboles cosmiques et telluriques s’entrechoquent en images exaspérées et discordantes : festin de volcans, fleurs de la violence d’une fusée, rêves furieux, détresse et chute du soleil, oiseau du sacrifice, reine des décombres, royaume fantomatique. Les puissances cosmiques et telluriques sont toutes présentes répondant à l’invocation du poète et de son île, tous deux métamorphosés et pétrifiés, l’une dans sa paix engourdie, l’autre dans sa déception exaspérée.

Il apparaît clairement, à la lueur de ces exemples que la métamorphose imprègne le verbe poétique jusqu’à en devenir un principe directeur. Elle s’accompagne, en outre, d’une fiévreuse dynamogénie, un flux de mouvements, une vivacité d’expressions motrices, avec l’usage intense de verbes performatifs accusant l’action : … les collines se soulevèrent… je m’y accrochai… je me réveillai… la terre se pousse… vire… se précipite… pousse à la mer…

Ce dynamisme est voulu, maîtrisé par le poète qui, avec l’emploi de métaphores de la vigueur et du mouvement, entraîne l’esprit libéré dans l’espace du monde irréel de la métamorphose.

« Tout est délivré, tout poétiquement est sauvé par la remise en vigueur d’un principe généralisé de mutation, de métamorphose »[10]

L’évasion vers le cosmos stellaire se manifeste clairement, au-delà de l’hermétisme des métaphores elliptiques, dans le poème Le coup de couteau du soleil dans le dos des villes soumises (Soleil cou coupé). Ce poème s’ouvre sur des visions oniriques … et je vis un premier animal…, visions qui se succèdent en apparitions d’étranges animaux, chimères hybrides de crocodile, de cheval, de chien, de dragonnier, de ver de terre, de chevrotain – succession aussi d’images stellaires : géante nocturne … étoile sur la croupe d’une planète…

En fait, il s’agit d’une rêverie stellaire. Le poète voit le ciel nocturne avec ses myriades d’étoiles. Il se projette dans la nuit des grands espaces infinis et il découvre les constellations dans le ciel, véritable bestiaire céleste : le crocodile est un saurien de la famille du lézard qui donne son nom à la constellation du Lézard (Lacerta), le cheval figure dans le constellation de Pégase,le chien appartient aux constellations du Grand et Petit Chien, le chevrotain représente la constellation du Capricorne, le ver de terre se rapporte à la constellation du Serpent et jusqu’au dragonnier, ce petit arbuste tropical qui évoque la constellation du Dragon. L’étoile polaire est désignée par la métaphorique femme glaçon.

Cette rêverie stellaire nocturne est une parfaite projection de l’être vers l’infini. C’est une évasion, c’est une métamorphose qui projette le poète dans l’Universel :

« Une rêverie parlée transforme la solitude du rêveur solitaire en une compagne ouverte à tous les êtres du monde »[11]

Nous observons que la métamorphose césairienne, cette extrusion de l’être pour y voir à l’envers des choses[12] , se manifeste souvent liée à l’image de la femme. Le poème Batouque nous offre plusieurs visions féminines éthérées, métamorphosantes : la femme devient objet tellurique :

Batouque de la femme aux bras de mer et aux cheveux de source sous-marine
Batouque de princesse noire de soleil fondant…

La femme devient une créature improbable, image fugitive qui se fond dans l’irréel en traversant ce fragile espace membraneux qui sépare le conscient de l’inconscient.

…Une femme en perfection de soleil lance ses tiges tubéreuses et disparaît de l’autre côté du monde… (Cheval)

Bel exemple de métamorphose mixte jumelant le soleil-cosmos et le végétal-tubéreuse

… de très loin d’outre moi / je viens vers toi / femme surgie d’un bel aubier (Aux écluses du vide)…
l’aube débusqua, très tendre, de graves filles couleur jacaranda, peignant lentement leurs cheveux de varech… (Lettre de Bahia-de-tous-les-saints)

 

La métamorphose marine – Le mythe de Protée.

La fureur de la métamorphose césairienne atteint un sommet dans le poème Intimité marine. Le poète interpelle la mer, interpellation rageuse :

Tu n’es pas un toit [13]… Tu n’es pas une tombe. Tu ignores tout silo dont tu n’éclates le ventre. Tu n’es pas une paix… D’ailleurs en un certain sens tu n’es pas autre chose que l’élan sauvage de mon sang…

Puis soudain, la métamorphose jaillit, le poète devient cheval en colère et grand serpent :

Et voilà qu’en cou de cheval en colère je me vois, en grand serpent. Je m’enroule, je me déroule je bondis. Je suis un vrai coursier… Je frappe, je brise, toute porte je brise et hennissant, absolu, cervelle[14], justice, enfance, je me brise.

Le poète prend la forme d’une fougueuse vague marine dévastatrice représentée métaphoriquement par un cheval – allégorie classique de la vague transfigurée en cheval marin, écumant, bondissant, hennissant. Il s’agit d’une image récurrente d’Aimé Césaire qui évoque les cavaleries salées (Cahier), les chevauchées [qui] courent la prétentaine aux prés salés d’abîmes (Les armes miraculeuses). Le poète prend la forme d’une fougueuse vague marine dévastatrice représentée métaphoriquement par un cheval

Victor Hugo use largement de la métaphore chevaline et ophidienne pour figurer la mer :

« On n’aperçoit rien, et l’on entend des cavaleries » (Les travailleurs de la mer)

« Les troupeaux de vagues » se transforment en « cavaleries furieuses… des crinières de flammes / à tous ces coursiers de la mer »

« Je suis la vaste mêlée / Reptile… (La légende des Siècles)

La métamorphose marine du poète prend toute sa valeur symbolique avec l’évocation du mythe de Protée, ce père mythologique de la métamorphose qui apparaît dans l’Odyssée avec les troupeaux de phoques dont Poseidon, dieu de la mer, lui avait confié la garde. Protée, dieu subalterne de la mer, est capable des plus étranges avatars. Devenu vague marine, il peut se transformer à loisir en cheval, lion, dragon, serpent, sanglier, porc, mouton, arbre, feu, eau, pierre, etc. De plus, Protée était doué du don de prophétie, mais fuyant les questions, sa métamorphose apparaît comme un refuge dans le rêve, loin des réalités brutales.

La vision mythologique du mythe de Protée apparaissant au Livre IV de l’Odyssée n’est peut être pas étrangère à l’inspiration métamorphosante des images de fureur chevaline et ophidienne qui animent le poème Intimité marine.

 

La métamorphose minérale

Je suis un homme de terre, de montagne et de feu

La métamorphose minérale est difficile à concevoir car les schémas de pensée habituels s’orientent vers la mollesse et la gluance tièdes, palpitantes de la matière vivante.

Ce n’est pas le cas de la transmutation minérale césairienne par laquelle le pierre est vivante et de plus génitrice :

Il vit à pierre fendre… (La forêt vierge)

La métamorphose minérale césairienne ouvre à l’imagination un monde de collines aux épaules grêles, de mornes faméliques, de soleil minéral, de rochers-oiseaux. Elle insuffle une pulsation vivante à la pierre génitrice, dans une vision animiste qui l’intègre dans le flux cyclique de la vie :

Et toi veuille astre de ton lumineux fondement tirer lémurien du sperme insondable de l’homme, la forme non osée que le ventre tremblant de la femme porte tel un minerai (Cahier)

Sublime image de métamorphose minérale et germinale – la pierre, sous sa forme primale de minerai, habite le ventre de la femme qui porte en elle la promesse d’une germination cosmique avec la naissance de l’homme attendu. La pierre, toute minéralité amorphe gommée, est investie d’une puissance créatrice qui dépasse les éléments et se trouve d’essence universelle. La métaphore filée de la métamorphose, … et toi veuille astre de ton lumineux fondement… est une prière de fertilité, une incantation adressée à l’Astre, puissance extra-terrestre qui gouverne les miraculeuses transmutations de la pierre et leur donne une dimension cosmique.

La métamorphose césairienne de la fertilité et de la germination associe souvent les astres, les étoiles, à la genèse métamorphique de l’homme. Les prairies sidérales [fêtent] la naissance de l’héritier mâle… (Les armes miraculeuses) et l’écho bachelardien répond : « Le minéral attire vraiment l’astral »[15] L’image de la métamorphose minérale prend ainsi les dimensions mythiques d’une anthropogonie. La pierre d’Aimé Césaire ne pétrifie pas la matière vivante, l’enfermant dans le corset rigide d’une structure cristalline indénouable. La pierre devient une onde de vie [qui] circonvient la papille du morne … (Cahier), onde parcourue d’influx pulsatiles ; elle parle par  la voix des hommes conservés dans la pétrification des forêts de mille ans. La pierre césairienne est le foyer d’où prend naissance une lignée d’hommes, une lithogénèse qui peut engendrer la vie :

L’onde de vie circonvient la papille du morne… gigantesque pouls sismique qui bat maintenant la mesure d’un corps vivant… (Cahier)

La métamorphose pétrifiante césairienne est génératrice de vie. Elle est genèse démiurgique.

 

La métamorphose végétale et germinale – Mythologie de la racine

C’est vrai que l’arbre me fascine. Tous les matins, avant d’aller à la Mairie, je vais dans mon jardin et je touche, et je palpe le tronc de mes arbres. J’ai besoin de leur influx. Il me donne l’énergie pour la journée. Tels sont les propos que le poète nous tint au cours d’une conversation, en 1989.

Il est vrai que l’arbre exerce une fascination amoureuse, panthéiste, une mystique à laquelle il s’abandonne sans retenue :

J’ai la tentation panthéiste. Je voudrais être tout. Je voudrais être tous les éléments… l’arbre est là. Il est partout,, il m’inquiète, il m’intrigue, il me nourrit. Il y a le phénomène de la racine, de l’accrochement au sol…[16] … l’arbre est fixité et persévérance dans l’essentiel… Je suis arbre, je veux être un arbre, ça dépend de la racine. Il faut commencer par l’enraciner d’abord…[17]

 

L’étreinte de l’arbre

dors doucement au tronc méticuleux de mon étreinte

                                    ma femme

                                    ma citadelle

La métamorphose végétale césairienne révèle la polyphonie des registres et la transmutation, quittant les champs sombres de la racine, s’éploie dans l’étreinte consolatrice d’une Mater dolorosa. Le poète-arbre, dans le poème Chevelure épanche sa nostalgie de la terre d’Afrique, l’Afrique envenimée par

tous les sucs qui montent dans la luxure de la terre
tous les poisons que distillent les alambics nocturnes…

Une détresse absolue, une misère irrémissible, imprègnent ce poème du désespoir et de l’exténuation – arbre nu, bombardé de sang de latérite, sucs, poisons, luxure, tonnerre, mots discordants, incendies des bûchers, révolte, fleuves qui titubent comme des aveugles, cri flambant de l’oiseau des ruines, orage, géant imbécile, tombes, naufragés…

Et soudain… au-dessus de ce champ de ruines, s’élève ce chant de tendre dévotion et de consolation recueillie,

dors doucement au tronc méticuleux de mon étreinte / ma femme / ma citadelle

L’homme devenu arbre, en une étreinte apaisée, ouvre son corps pour accueillir son Afrique, sa femme blessée, sa citadelle profanée. Ce vers sublime nous transporte dans un rêve élégiaque où nos sens tour à tour sont saisis par un climat édénique de douceur, de tendresse, avec le raffinement sensuel de l’étreinte d’une femme à la fois protégée et protectrice. À cela s’ajoute le bonheur physiologique des contrastes sensoriels : la sécheresse ligneuse du tronc masculin opposée à l’élasticité humide du corps féminin, l’abandon languide du corps en sommeil opposé à la verticalité de la citadelle, en éveil tendu…

Cette image de l’arbre de la consolation accueillant en son sein les corps meurtris fait partie du champ archétypal des passeurs d’âmes, image première qui habite la mémoire collective comme nous le rappelle Bachelard :

« Dès sa naissance l’homme était voué au végétal, il avait son arbre personnel. Il fallait que la mort ait la même protection que la vie. Ainsi, replacé au cœur du végétal, rendu au sein végétant de l’arbre, le cadavre était livré au feu… ou bien enfin, plus intimement, toujours allongé dans son cercueil naturel, dans son double végétal, dans son dévorant et vivant sarcophage, dans l’Arbre – entre deux nœuds – il était donné à l’eau, il était abandonné aux flots »[18]

Une image voisine d’étreinte végétale dans la métamorphose apparaît dans le poème Élégie, chant mélancolique adressé à la sylve :

et ne t’étonne pas si la nuit je geins plus lourdement
ou si mes mains étranglent plus sourdement
… cherche plus profond mon cœur
alors rien ne me sert de serrer mon cœur contre le tien
et de me perdre dans le feuillage de tes bras

Avec cette image du tronc accueillant et consolateur des âmes mortes, la métamorphose végétale céairienne rejoint les grands mythes collectifs qui peuplent l’imaginaire.

Ultime pulsation d’un corps à l’agonie, cette transmutation accompagne le mourant qui s’éteint, non dans l’exténuation de l’être et l’extinction de l’âme, mais au contraire, dans la gloire d’une expansion des éléments de la nature, l’eau, la plante, la pierre. Ainsi la scène sublime de l’entrée en agonie du Rebelle (Et les chiens se taisaient, Acte III) :

Et je suis jeune, je suis opulent de jeunesse…
Un lac de sécheresse pend sur ma joue, mais il pleure des yeux aux arbres de Judée baignés de crocus et d’anémones
je suis nu
je suis nu dans les pierres / je veux mourir

Examinée attentivement, il apparaît que la fascination césairienne pour l’arbre se nourrit surtout du prestige de la racine. L’arbre est familier, le poète le lutine, lui fait des blagues, joue avec lui comme avec un objet favori. L’arbre est un lutteur fauve (Espace rapace), c’est un athlète-fétiche(Rumination d’une caldeira), c’est le baobab qui mal agite des bras si nains qu’on le croirait un géant imbécile (Chevelure)… En fait, la vénération de l’arbre prend des libertés avec l’image qui se voit taquinées, câlinée par moquerie et dérision comme ces êtres si familiers et tant chéris et pourtant malmenés dans l’espièglerie d’une effusion affectueuse.

Rien de tout cela avec la racine ! Aucune impertinence, aucune raillerie, aucune ironie goguenarde, ne viennent griffer le corps sublime de la racine dont l’image garde toujours sa profondeur symbolique et son épaisseur biologique. Le poète ne s’autorise aucune licence avec la racine car il sent confusément que c’est de son corps et de sa sève intime qu’il s’agit :

…moi le portefaix
je suis le porte racine… (Corps perdu)

Le ton affecté à la racine est toujours d’une grande élévation lyrique, suspendu dans les hauteurs du tragique. :

…je suis devenu un arbre et mes longs pieds d’arbre ont creusé dans le sol de larges sacs à venin… (Cahier)… Au bout du petit matin, flaques perdues, parfums errants, ouragans échoués, volcans morts mal racinés… (Cahier) … mes pieds vont le vermineux cheminement… (Les pur-sang)

« Une vie de racines et de bourgeons est au cœur de notre être. Nous sommes vraiment de très vieilles plantes »[19]

La fascination par la racine revient obstinément dans les propos d’Aimé Césaire :

Je suis un arbre, je veux être arbre et je considère que le sommet de l’arbre, ca dépend de sa racine. Il faut commencer par l’enraciner d’abord. À ce moment-là, il poussera des feuilles, des branches, il montera plus haut dans le ciel et plus large dans l’espace [20]

et le poète ajoute afin de mieux nous saisir avec son obsession racinienne :

Je suis effectivement obsédé par la végétation, par la fleur, par la racine. Rien de tout cela n’est gratuit. Tout est lié à ma situation d’homme exilé de son sol original… L’arbre profondément enraciné dans le sol, c’est pour moi le symbole de l’homme lié à la nature, la nostalgie d’un paradis perdu[21]

Aimé Césaire retrouve là les accents nietzschéens de l’invocation à la racine : « Il en est de l’homme comme de   l’arbre. Plus il veut s’élever vers les hauteurs et la clarté, plus fortement ses racines s’enfoncent dans la terre, dans les ténèbres et dans la profondeur »[22]

L’homme se coule dans les réseaux de la racine mythique, circule dans les veines de la terre et plonge dans les poches à venins qui infectent les profondeurs de la glèbe pestilente (Et les chiens se taisaient) La métamorphose du Rebelle est celle de la transmutation homme-racine avec ce cheminement obscur au sein d’une terre blessée par l’usure et la souillure :

Le Rebelle : C’est vrai on accepte la puante stérilité d’une glèbe usée…
Je ne l’accepte ce cri que comme la chimie de l’engrais qui ne vaut que s’il meurt
A faire renaître une terre sans pestilence…
Il y a des baobabs, du chêne vif, des sapins noirs, du noyer blanc ;
Je veux qu’ils poussent tous bien fermes et drus… mais pareillement pleins de sève…
… j’enfonce à mi-jambes dans les hautes sphères du sang…

L’anthropomorphisme de l’arbre, comme le végétalisme de l’homme s’expriment dans cette image des jambes qui s’enfoncent dans la terre « une jambe de l’homme prend une torsion térébrante pour s’installer comme une racine, profondément en terre »[23]

La métamorphose germinale se nourrit de ces images d’engrais et de sève, de cette fécondité qui génèrera un monde où les différences ne sont plus singularités mais dépassement et conquête d’une nouvelle et plus large fraternité[24].

Mais la racine peut être hideuse, se transformant en bête serpentiforme porteuse d’angoisse. Le poète se métamorphose en plante qui, droite et la conscience pure, cherche sa voie dans la lumière ou sa perte dans les ténèbres :

je pousse comme une plante
sans remords et sans gauchissement
vers les heures dénouées du jour
pur et sûr comme une plante
sans crucifiement
vers les heures dénouées du soir
La fin !

             Mes pieds vont le vermineux cheminement
             plante

mes membres ligneux conduisent d’étranges sèves

plante plante   (Les pur-sang)

Permanence des archétypes qui peuplent l’imaginaire… le vermineux cheminement de la racine césairienne répond en écho à l’angoissante racine reptilienne de Victor Hugo :

« L’animal a sa griffe et l’arbre sa racine
Et la racine affreuse et pareille aux serpents
Fait dans l’obscurité de sombres guet-apens…
Dieu… change quand il lui plaît le serpent
En racine… » (Dieu)[25]

 

Nous relevons d’autres images de racines et lianes maléfiques, dévorantes, porteuses de mort.

… Barbare
Des morts qui circulent dans les veines de la terre (Barbare)
… le lynch est une belle chevelure que l’effroi rejette sur mon visage, le lynch est un temple ruiné par les racines et sanglé de forêt vierge (Lynch)
… que les lianes balafrent dans le vide de grands coups de rasoir
que les racines s’envoient dans ma gorge veloutée de grands coups de rhum macéré de fourmis vénéneuses   (Quelconque)

 Mais la racine est aussi l’ancre salvatrice qui met un terme à l’errance du poète métamorphosé en le fixant au repos dans le port tant espéré. Le poème Corps perdu nous offre une telle image :

place à mon repos qui porte en vague
ma terrible crête de racines ancreuses
… moi le porte-faix je suis porte racines
… et par mes branches déchiquetées
et par le jet insolent de mon fût blessé et solennel
je commanderai aux îles d’exister

 

L’image séminale de la graine

« … force germante… les rêveries de la germination » accompagnent la métamorphose césairienne dont le foyer est la graine ensemencée. Le poète proclame cette filiation – faites aussi de moi un homme d’ensemencement (Cahier) et communie charnellement avec la matière féconde de la terre, de l’eau, de l’air, grâce à l’entremise de la graine volante. Métamorphose bienheureuse que celle de cette petite graine qui vole portant en elle les fruits attendus de l’espoir et de l’enchantement, petite graine qui vole rêveuse et obstinée dans les méandres poétiques.

N’y eût-il dans le désert
Qu’une seule goutte d’eau qui rêve tout bas
Dans le désert n’y eût-il
Qu’une graine volante qui rêve tout haut
C’est assez… désert désert, j’endure ton défi…
( Blanc à remplir sur la carte voyageuse du pollen)

Merveille de pureté et de concision poétique où se retrouvent la force ramassée du verbe césairien :

  • le désert : la sécheresse, la stérilité minérale, l’absence de vie : la détresse.
  • la goutte d’eau : l’eau séminale porteuse de vie, qui s’infiltre dans la roche : l’espérance.
  • La graine volante : la semence, la germination, le frémissement annonciateur d’une vie nouvelle. Le poète fortifié se redresse et lance son défi.

Telle est la trilogie – détresse, espoir, renaissance – l’arche tripode de la poésie césairienne.

Autres métamorphoses germinales à partir de la graine féconde victorieuse de la pierre stérile :

… de chaque grain de sable naîtra un oiseau… (Calme)
et nous ramène sur le sable en noyés en chair de goyaves déchirés en une main d’épure en belles algues en graine volante en bulle en souvenance en arbre précatoire (À l’Afrique)
que les graines volantes strient l’air de leurs hélices (Quelconque)
reprenons / l’utile chemin patient / plus bas que les racines le chemin de la graine…
mais il n’y a pas de miracle / seule la force des graines / selon leur entêtement à mourir/
parler c’est accompagner la graine / jusqu’au noir secret des nombres… (Chemin)
de coques déchirées / de graines volantes (Configurations)
… aile sûre, des graines, je suis prêt !
… glèbe tassée, je suis prêt, eau des vertelles, je suis prêt ! (Et les chiens se taisaient)
… germez fruits germez et pavoisez soleils
à travers les rayures mille et une
au ciel comme sur terre de la pluie notre volonté ( Dans les boues de l’avenir, poème inédit)

Véritable épiphanie, la métamorphose germinale d’Aimé Césaire donne naissance à partir de l’amorphe, au surgissement de la vie, au milieu des forces cosmiques du soleil et de la terre, élan vers l’universel.

 

La force métamorphosante du Verbe

Cet « attachement profond à la terre et au terroir particulier »[26] est indissolublement lié au nécessaire épanouissement du développement et de l’universel. C’est une effusion qui, jaillie des strates les plus profondes de sa conscience, projette le poète, par la force métamorphosante du Verbe, hors de limites charnelles vers les limbes de l’Universel.

L’animisme métamorphosant qui imprègne cette poésie est d’essence africaine comme l’énonce Jahnheinz Jahn dans son livre Muntu. La force souveraine du verbe, dans un mouvement dialectique nietzschéen, donne vie à la matière inanimée et pétrifie la matière vivante. Il en résulte un être hybride, une fantastique chimère, issus d’une métamorphose démiurgique. Cet être qui, à la fois, porte en lui le souffle du vivant et l’inanimé est un être qui échappe à toute catégorisation : c’est un universel qui étreint en lui les puissances de l’univers.

Par le Nommo, par la parole, le poète « appelle “les choses” à surgir de la grande totalité universelle et aussitôt, elles sont là, présentes.“je retrouverais le secret des grandes communications et des grandes combustions. Je dirais orage, je dirais fleuve, je dirais arbre”, dit Aimé Césaire… Le Verbe du poème ne fait pas qu’appeler les “choses”, il les engendre, car il est Nommo, parole-sperme »[27]

Ce verbe est une force qui porte en elle la totalité ees éspèces vivantes et inanimées et, de ce fait, elle atteint l’universel :

« L’évocation est en même temps un processus de métamorphose… qui s’opère dans l’espace et dans le temps… Elle commande une succession d’évènements dont le poète est à la fois, la source et le spectateur.“Les nègres vont cherchant dans la poussière les échardes dont on fait le mica dont on fait les lunes et l’ardoise lamelleuse dont les orciers font l’intime férocité des étoiles”[28] »[29]

L’abandon du poète aux forces élémentaires par la vertu de la métamorphose est une arme miraculeuse, l’expression d’une rébellion, révolte de la victime à la blessure immémoriale qui, s’évadant de sa fragile et chétive enveloppe charnelle se réfugie dans le monde végétal, dans le minéral, dans le cosmos, loin des contingences douloureuses infligées par l’Histoire. Il gagne ainsi sa liberté et celle de son peuple, de sa race.

En ce sens, la métamorphose est une métaphysique.

« Se vouloir terre et arbre pour gagner sa liberté, être libre pour s’identifier souverainement à la terre et à l’arbre. Toute poésie est une recherche intime, convulsive, vers une “ombre de soi qui en soi fait des signes d’amitié”. L’homme projette vers un autre ce qu’il veut être »[30]

Dans cette vision, la plante, la graine, l’arbre, le roc, la montagne, l’océan, le volcan, le soleil, les étoiles sont les compagnons obligés du poète dans son long cheminement vers la liberté et l’Universel, jusqu’au noir secret des nombres[31]

 

 

 

 

[1] Poinsettia : de Poinsett, nom d’un botaniste américain, ambassadeur au Mexique de 1825 à 1829. Arbuste ornemental originaire du Mexique, aux bractées d’un rouge très vif entourant de petites fleurs jaunes et communément appelé étoile de Noël. Appelé en Martinique six mois rouge-six mois vert.

[2] Aimé Césaire, Question préalable, Soleil cou coupé.

[3] Chameau : un des noms du pélican, chameau de rivière ; pape : Oiseau, perroquet d’Amérique aux vives couleurs encore appelé papegeai.

[4] Souligné par Aimé Césaire.

[5] Aimé Césaire, Poésie et connaissance, Tropiques, n° 12, janvier 1945, Jean-Michel Place, 1978, pp.157-170.

[6] J.P.Sartre, Orphée noir, in : Léopold Sédar Senghor, Anthologie de la nouvelle poésie nègre et malgache, Quadrige, P.U.F., 1948, p. XXXVI.

[7] Aimé Césaire, Calendrier lagunaire.

[8] Entretien avec Gérard-Georges Pigeon, 12 janvier 1977, Cahiers césairiens n°3, 1977, p.1.

[9] Voir analyse commentée de ce poème in : René Hénane, Les jardins d’Aimé Césaire, L’Harmattan, 2003, pp.242-249.

[10] André Breton, Anthologie de l’humour noir.

[11] Gaston Bachelard, Poétique de la rêverie, PUF, 1960, p.160.

[12] Aimé Césaire, Discours de distribution des prix devant les jeunes filles du pensionnat colonial, Fort-de-France, Juillet 1945, in : Aimé Césaire, Une pensée pour le XXIe siècle, Présence africaine, p.567.

[13] En référence au premier vers du Cimetière marin de Paul Valéry : Ce toit tranquille où marchent des colombes.

[14] Noter cette étrange association d’image entre le cheval et la cervelle, association que nous retrouvons dans le poème suivant  : …la terre se pousse une crinière… roule dans sa cervelle… les chevaux… (Bucolique, p.341)

[15] G.Bachelard, La terre et les rêveries de la volonté, Corti 1947, p.303.

[16] Entretien avec Daniel Maximin, La poésie parole essentielle, Présence africaine, n°126, 1983, pp.9-10.

[17] Entretien avec Lilyan Kesteloot, in : Kesteloot et Kotchi, Aimé Césaire, l’homme et l’œuvre, Présence africaine, 1993, p.206.

[18] G.Bachelard, L’eau et les rêves, Corti, 1942, p.86.

[19] G.Bachelard, Le droit de rêver, PUF, 1970, p.82.

[20] L.Kesteloot et B. Kotchi, op. cité, p.206.

[21] Aimé Césaire. Entretien avec J. Sieger, Afrique, n°5, octobre 1961.

[22] Ainsi parla Zarathoustra, cité in : M.Mansuy, Gaston Bachelard et les éléments, Corti, 1967, p.338.

[23] G.Bachelard, Le droit de rêver, PUF, 1970, p.83.

[24] Aimé Césaire, Discours sur le colonialisme.

[25] Cité in : P.Albouy, La création mythologique chez Victor Hugo, Corti, 1985, p.337.

[26] Annick Thébia-Melsan, Discours de clôture in : Aimé Césaire, une pensée pour le XXIe siècle, Présence africaine, p.560. « L’approche césairienne, dialectiquement complémentaire du local et de l’universel, pour édifier dans notre modernité un universel partagé, est une anticipation sur l’indigénisation du développement et son ré-enracinement, dans son sens plein étymologique : Gens indi, les gens de la terre. Là aussi Aimé Césaire est un précurseur et un pionnier, un visionnaire, parce qu’il a compris que sans cet attachement profond à la terre et au terroir particulier, il n’y aurait pas de développement et pas d’universel. »

[27] Jahnheinz Jahn, Muntu, Le Seuil, 1961, pp.151-152.

[28] Aimé Césaire, Couteaux midi, Soleil cou coupé.

[29] Jahnheinz Jahn, op.cité, p.155.

[30] Édouard Glissant, Aimé Césaire et la découverte du monde, Les Lettres nouvelles, janvier 1956.

[31] Aimé Césaire, Chemin, Moi, laminaire...