LA PISCINE MUNICIPALE ALFRED NAKACHE
Toulouse a eu la chance de posséder très tôt, dès 1931, une très belle piscine municipale, où de nombreuses générations de toulousains ont eu la possibilité d’apprendre à nager, ou du moins de se baigner.
A commencer par celle de mes parents, puisque j’ai des photos où l’on voit mon père, adolescent, avec ses amis, dont Pierrot Laffargue, profiter des vastes espaces ouverts au public.
La piscine municipale Alfred Nakache, se décompose en 3 parties :
– une piscine couverte de 25 m.
– une piscine olympique en plein air, de 50 m, avec plongeoir,
– et un immense bassin (150x50m) de faible profondeur, qui aboutit à une belle chute d’eau tout en rocaille.
Toulouse – La Grande Piscine Art Déco
La piscine extérieure fut construite en 1931, par le célèbre architecte Jean Montariol, qui réalisa un certain nombre de constructions “Art Déco” dans la cité gasconne, et notamment la belle bibliothèque municipale. A l’ouest du domaine fut érigée la piscine olympique de plein air de 50m.
Situé dans le parc du Ramier, sur l’île de la Garonne, l’ensemble s’étendait sur un site de 25 ha, l’un des plus grands d’Europe.
En 1934 suivit la piscine d’hiver de 25m dans un bâtiment Art Déco, avec une salle affectée aux fêtes et banquets, et l’institut d’éducation physique.
Troisième tranche, “le Stadium” est inauguré en 1939, avant d’être complètement achevé en 1952, assez tôt pour que je puisse y aller tous les dimanches assister avec mon père aux matches du TFC.
Alfred Nakache : C’est fin 1944 que la piscine municipale de Toulouse reçut le nom d’Alfred Nakache, pour honorer ce grand nageur toulousain, alors en déportation au camp de concentration d’Auschwitz. La décision fut prise par le premier maire de Toulouse libérée, Raymond Badiou.
Alfred Nakache était juif, natif de Constantine (Algérie), champion de natation français. Il fut déporté en janvier 1944, avec sa femme et ses 2 filles, qui ne devaient pas en revenir. Surnommé le “nageur d’Auschwitz”, il en réchappa et trouva la force de participer aux JO de Londres en 48
Comment j’y ai appris à nager ?
C’est bien à la piscine municipale de Toulouse que j’ai appris à nager. Mais cela ne s’est pas fait de façon orthodoxe.
La piscine d’hiver
Première étape, notre instituteur, M. Guichard, nous amène 3 fois de suite pendant l’hiver 55 en bus à la piscine. Nous débarquons dans des vestiaires communs peu accueillants, une forte odeur de javel imprègne l’atmosphère, des lignes de grosses bouées façon transatlantique sont suspendues en travers du bassin. Nous avons chacun la nôtre, et un maître baigneur donne des ordres comme dans l’armée : il s’agit de faire les mouvements de la brasse en l’air, avant que nous ne soyons plongés dans l’eau. Le système est ingénieux, mais le contexte de groupe est bloquant et mes efforts, peu motivés, se soldent par un échec.
Deuxième étape, l’été suivant, je reviens à la piscine d’été, librement, en vélo, avec des copains, dont les Bentaberry’s, qui savent nager depuis longtemps, et qui ont décidé qu’il était temps que j’en fasse autant.
L’apprentissage est ici librement consenti.
Il fait beau, et c’est en jouant que je vais savoir nager :
La méthode fut simple, nous nous amusions à franchir, sous l’eau, la barrière puissante faite par la chute d’eau circulaire de la cascade. Quel plaisir que de plonger sous la cascade, de faire quelques brasses, et de ressortir côté ombre, dans cette caverne magique placée entre le rocher et la cascade.
C’est après avoir fait plusieurs fois le chemin, en pratiquant une nage sous marine brassée, que je m’aperçois que si je sais avancer sous l’eau, je dois pouvoir progresser de la même manière à la surface : vérification faite illico presto.
Et ça fonctionne, je sais nager ! J’ai 11 ans et à cette époque encore peu de gamins en sont capables.
J’ai donc appris en jouant. Le jeu aura été pour moi un fabuleux facteur d’apprentissage. Avec un enseignement essentiellement basé sur ce type de méthode, j’aurai fait mon éducation beaucoup plus rapidement, et avec beaucoup plus de plaisir.
J’ai horreur du bâton, je préconise la carotte : c’est un enseignement que j’ai toujours mis en pratique dans ma vie professionnelle.
Autre plaisir de l’été, les sauts depuis le tremplin. Il y a 2 hauteurs, 3 et 5 mètres. Déjà à 3m, le vertige me prend. Les Bentaberry’s savent plonger. Je me hasarderai, la peur au ventre, je ne peux pas me dégonfler, et je saute en boule au 3m.
Au 5m, je ne peux pas avancer : je ne serai jamais un grand plongeur
LA PISCINE DE l’EAT
C’est ma deuxième piscine toulousaine. Elle est située en bas de Jolimont, côté nord, entre la Roseraie et la Juncasse, dans l’enceinte des Etablissements Aéronautiques Toulousains (EAT), où travaille Pierrot Laffargue.
Toute proche de la maison, il faut 3 minutes en mobylette ou 1/4 heure à pieds pour s’y rendre.
D’abord privée, elle va progressivement s’ouvrir à des clients extérieurs, moyennant un abonnement qui nous paraît cher (tennis+piscine).
Les parents finissent par céder à notre pression, à Bernard et à moi, bien aidés par Suzanne Bentaberry, qui y donne des cours, et à l’âge de 14ans je peux accéder à ce site élitiste, comme le sont piscine et tennis dans les années 55/60. C’est pour moi un vrai luxe, une forte motivation à prendre l’ascenseur social !
J’y ferai de gros progrès, en bronzage et natation, et SB m’y fera passer le brevet du 1000m, que j’aurai d’ailleurs du mal à finir, pris de crampe à 15m de l’arrivée…
C’est dans ce club de l’Aseat, que je pourrai jouer au tennis, et faire des progrès en total autodidacte. Cela me permettra de déployer mes qualités naturelles, peu orthodoxes, qui feront s’arracher les cheveux aux puristes, mais me permettront de battre de “beaux joueurs” au jeu bien léché.
Avec mon jeu venu d’ailleurs, je casse les codes enseignés par l’école française de tennis, et je déstabilise les adeptes du beau coup droit bien dans l’axe du terrain!
Et au retour de ces matches disputés en pleine chaleur de l’après midi, notamment avec mes correspondants allemands, ou Jackson, nous “descendons” des carafes d’eau avec un peu de vin rouge pour accompagner le camembert entier, qui ne résiste pas à notre appétit.
Quels beaux étés, même à la maison, en restant à Toulouse!