Mondes pacifiques

Corps, mémoire et identité dans l’écriture de Stéphanie Ari’irau Richard

Résumé 

Dans cet article, je me propose d’analyser les complexités psycho-philosophiques de l’identité dans l’écriture de Stéphanie Ari’irau Richard, l’une des auteures polynésiennes et océaniennes les plus considérables. Cet espace complexe représente une conscience de décentralisation, un réseau de transgressions et de transpositions mentales et physiques, un imaginaire de l’insularité et de l’archipélité : toute étude doit être ouverte pour prendre en compte les visions du monde, les épistémologies et les histoires des peuples de l’Océanie, définissant comme point de départ ou point essentiel de toute analyse les différentes stratégies et constructions de connaissance, les dynamiques langagières et les échanges et influences inter-linguistiques.

Mon objectif analytique consiste à découvrir les structures et les représentations de l’identité personnelle et collective, de la corporéité et de la mémoire dans l’œuvre d’Ari’irau Richard, de les retracer jusqu’au fond des manifestations langagières pour étudier les composantes psycho-philosophiques de la subjectivité et de la collectivité.

 

1. Introduction

La région d’Océanie comprend 16 pays et 16 dépendances, dont la Polynésie française, collectivité d’outre-mer de la République française située dans le Pacifique Sud[1] qui se compose de cinq archipels, de 118 îles[2]. Les îles parsemées qui forment l’ensemble « pluriarchipélagique »[3] de la Polynésie française sont des atolls ou des îles d’origine volcanique (îles hautes).

Stéphanie Ari’irau Richard est l’un des auteurs les plus considérables de la littérature polynésienne contemporaine d’expression française. Elle est née à Pirae, Tahiti d’une mère demie tahitienne et d’un père français. Elle a fait ses études à l’Université d’Angers et à l’Université de New York (études doctorales). En 2005, elle publie chez l’Harmattan son premier roman, Je reviendrai à Tahiti. Matamimi paraît en 2006 aux éditions Au vent des îles.

Le pouvoir incantatoire des mots, leur force créative et constructive, leur rôle dans les diverses formes discursives explicitées et exploitées  dans le roman Matamimi de Stéphanie Ari’irau Richard[4] ne peuvent être conçus qu’en situant l’œuvre dans le contexte psycho-philosophique et épistémologique complexe de l’Océanie[5]. Cet espace complexe représente une conscience de décentralisation, un réseau de transgressions et de transpositions mentales et physiques, un imaginaire de l’insularité et de l’archipélité qui se prêtent particulièrement à une « décolonisation » notionnelle, conceptuelle, méta-critique. Le recours au terme de décolonisation est à prendre ici dans le sens utilisé par Konai Helu Thaman[6] (2003). Le caractère critique, ouvert et flexible de l’étude de toute question concernant les études océaniennes, les questions identitaires et littéraires doivent refléter les dynamiques et les échanges interinsulaires et interarchipéliques, les richesses épistémologiques et la complexité des relations et interinfluences des différentes aires de l’univers océanien. Cela doit impliquer et prendre en compte les visions du monde, les épistémologies et les histoires des peuples de l’Océanie, définissant comme point de départ ou point essentiel de toute analyse les différentes stratégies et constructions de connaissance, les dynamiques de la théorisation et de la constitution de narratives épistémologiques, culturelles. La force créative du discours littéraire et théorique peut être saisie dans la réflexion de Subramani[7] sur les enjeux socio-linguistiques, psycho-philosophiques et épistémologiques de l’importance de la production théorique et créative en langues vernaculaires. L’appropriation productive, la postulation et la réaffirmation de soi passe par des dynamiques langagières : l’identité hybride et hétérogène se postule, se crée et se complexifie dans l’espace interstitiel de l’univers plurilingue, dans la transformation permanente d’espaces linguistiques et narratifs de la négociation plurilingue qui caractérise le monde et le sujet océaniens[8]

 

2. Lieux de la mémoire, dynamique existentielle

Dans Matamimi, le développement textuel fait coexister une évolution existentielle permanente : l’auteure est la dépositaire d’une mémoire constituante qui scintille, clignote et se téléscope en avant et en arrière dans une temporalité symbolique. L’architectonique de cette mémoire pluritemporelle[9] est d’une projection incantatoire et constitutive qui, par la quête, le surgissement et le pouvoir structurant et existentiel du langage crée un continu psychique, affectif et mémoriel. C’est une continuité qui sert de cadre pour l’invention de l’identité de Matamimi, un tissage textuel qui entrelace les bribes, les traces, les vestiges ontologiques d’un être, un champ de transmission et de dévoilement à la fois textuel et ontique qui précède, prépare, sollicite, convoque et donne naissance à la fille de la narratrice[10].

Le livre d’Ari’irau Richard, saisi et appréhendé dans son objectité, dans sa corporéité et tangibilité du textuel, est un ouvrage du dévoilement et de la cristallisation d’un moi, d’une invention identitaire polyscopique dans le transport mutuel et l’échange de différentes sphères d’imageries mentales[11].

 

3. Individuation narrative, discours actanciel

Le livre-objet d’Ari’irau Richard est un lieu, un monument de la transmission mémorielle, une œuvre de parau pa’ari[12]. L’ouvrage est un avei’a[13], un schéma mental organisateur, un ā’ai[14] de la vie et de la mort : « Si j’écris, c’est pour te faire naître, et pour me faire mourir »[15]. La narratrice se fait ‘orero[16], se développe et se déploie ; la naissance et l’individuation de sa fille, Matamimi, passe par la remémoration narrativisée de l’identité de l’auteure, à travers la création textuelle autoréférentielle d’un discours génératif[17] d’identité personnelle et collective. Ce parcours énonciatif-constitutif prépare, remplit et construit l’horizon d’acceptions du sujet, engendre des prédications qui désignent, définissent l’individualité par leur force référentielle véhiculant une identification. Nous sommes témoins d’un transport discursif[18] qui crée un espace d’alternance constante, une intersubjectivité permanente qui encadre la genèse de la personnalité de Matamimi et la présente comme phénomène inhérent à l’univers mental de l’auteure-narratrice du texte. La configuration polyscopique du texte[19], la multiplication de lieux physiques et mentaux, la pluralité de tonalités et de points de vue créent une énonciation changeante, mouvante, un éclatement du sujet, de l’identité. Le texte invente, inaugure et différencie l’existence d’un être, c’est une deixis à l’origine de la structure polyphonique du livre, à l’arrière-plan de la présence kaléidoscopique de Matamimi : sa figure surplombe et sous-tend l’ouvrage entier, sa présence est à la fois textuellement tangible, palpable et méta-narrative[20] ; une omniprésence qui régit les manifestations autonymiques, les dialogues, les réseaux associatifs et même les passages et allusions intertextuels[21].

Les chants de l’oralité polynésienne sont des cristallisations de la culture, de la transmission d’un savoir profond, des « formes privilégiées de fixation de la mémoire »[22]. Ce sont des supports, des fondements pour la navigation des pensées[23] qui sont toujours dépositaires d’une valeur et d’une force hautement illocutoires et performatives qui témoignent ou rendent compte de la naissance, des points de densification de la vie, et de la mort. Matamimi est un chant généalogique aussi, un corpus d’histoires rassemblées d’ancêtres, d’îles et de pays, de temps et d’âges ; un chant qui retrouve, affirme et construit un passé, un présent et un futur ; un texte qui crée et réinvente sans cesse les personnages et la narratrice ; un texte qui rompt et reconstruit le fil temporel, qui fait surgir les traces et empreintes de la mémoire, d’une mémoire individuelle, insulaire et archipélique[24]. La dynamique affective mise en œuvre fait surgir une existence qui naît et prend forme dans sa conceptualisation par l’écrit, dans sa référentialité centrale et omniprésente. Matamimi est un opérateur existentiel qui vit par le texte et qui est à l’origine d’un effet de gémellarité[25], dont la représentativité textuelle, la fulgurance conceptuelle[26] et la permanence matricielle croissante tendent vers l’anéantissement de sa créatrice, de sa mère : « À l’instant même où je t’écris, je devine que tu es celle qui écrit, qui m’écrit. »[27], « Toi, tu es éternelle, et moi, je suis morte ce jeudi après-midi »[28].

Le mot marae désigne un « lieu, une plate-forme défrichée, débarrassée des arbres, broussailles », un lieu de culte ancien, de réunion, un lieu cérémoniel[29]. L’œuvre de Stéphanie Ari’irau Richard est un lieu de rencontre, un noyau de transformation et de (re)construction incessante, une combinaison, une structure polyvalente qui associe des expériences, des vécus, les schémas mentaux polynésien et européen, différents imaginaires culturels et herméneutiques[30].

 

3.1. Parau, hīmene, fenua : écriture et identité

Dès le début du roman, l’auteure mêle les traits fictionnels aux éléments traditionnels de l’identité culturelle et traite de la transformation et de la réinvention permanente de l’écriture dans un univers scriptural contourné par le cadre de la genèse polynésienne[31], du panthéon polynésien traditionnel, des considérations philosophiques et historico-politiques sur les échanges et rapports entre la France métropolitaine et la Polynésie française.

« … un amphithéâtre de fougères s’est propulsé hors de l’océan, un amphithéâtre merveilleux et organique qui, perfusé par une force inconnue, a décidé de naître de lui-même, loin de tout, loin des autres … dont les fondements sont profondément enfouis dans du sable noir. Te fenua nehenehe, le beau pays. »[32]

Le mot fenua[33] signifie terre, île, pays, Fenua réfère à la Polynésie française : Ari’irau Richard nous présente le fondement, le magma essentiel[34] de la réalité culturelle tahitienne, les anciens, qui sont les dépositaires de tout savoir et savoir-faire traditionnels, de l’héritage oral. Ils sont les liens vivants avec le passé organiquement lié au présent servant de plate-forme pour l’avenir.

« Pour satisfaire aux goÛts de tous, on a placé des anciennes au centre de la scène, les māmā[35] … Des anciennes qui tissent habilement les nattes, les chapeaux, les paniers… les anciennes qui chantent en chœur les hīmene[36]. Des anciennes les livres ouverts à la main, qui racontent nos légendes et nous lisent des poèmes écrits à l’encre invisible, des anciennes qui traduisent pour nous des textes qui nous sont chers… »[37]

L’oralité est un moyen de la médiation entre les temps immémoriaux et la réalité contemporaine[38], le rôle des hīmene (chant, cantique) peut être caractérisé par les mots pehe[39], papa[40], pou[41] ou faura’o[42]. Chaque terme souligne l’affirmation de la conscience d’un patrimoine hérité, d’une continuité culturelle[43] et identitaire avec l’imaginaire pré-européen du fenua nehenehe[44]. Ce récit est un parcours existentiel, l’articulation de l’être de Matamimi dont la présence se solidifie, se réifie[45] et se textualise  dans l’entrelacement de registres mobiles, dans une architecture plurielle qui juxtapose certains éléments et traits des chants ancestraux, un vocabulaire en tahitien organiquement intégré dans le texte français, les personnages importants de la culture et littérature polynésiennes[46], les fragments de l’histoire familiale, les principaux enjeux socio-politiques de la Polynésie française[47].

 

3.2. Corporéité, métalepse, structures d’expérience

La constitution du personnage et des histoires de Matamimi relève de la métalepse[48] et de l’hypotypose[49]. La narratrice est ancrée dans la recherche de la compréhension de soi ; la cohésion du texte n’a pas comme préalable constituant la mêmeté de l’auteure, mais l’ipséité de Matamimi[50]. La présence de la narratrice fonctionne comme une liaison, comme une médiation entre les registres et chapitres nettement fictionnels et les contenus, selon toute vraisemblance, relevant de l’autobiographique (et de l’autocritique, du réflexif). L’auteure-narratrice assume le rôle d’acteur pour inventer, constituer le personnage de Matamimi dans le chantier identitaire du roman à travers des approximations narratives, dans une architecture qui est en constante interrelation à la fois avec les ancêtres et la postérité et qui s’écrit dans l’axe constitutif et manipulant-structurant-configurant de l’écriture de l’autre :

« J’ai omis de dire aux hommes que tu étais née, que tu étais libre, que tu étais belle. Je tiens à rectifier cette erreur. »[51]

« Cet enchaînement de mots, ce tramway, wagon de phrases manuscrites, le désir pathétique de moi pour toi […] L’accouchement douloureux de mon écriture. »[52]

« Matamimi ma fille, tu es si vivante. Tu existes, tu es là […] J’ai écrit ce journal pour toi Matamimi. »[53]

« Je me souviendrai, surtout, du jour de ta naissance. Ce jour même, où je me suis dévoilée sans pudeur à un lecteur inconnu. Tu es née, ce jour même, par la volonté d’une autre ou d’un autre, qui a fait l’effort de te lire, de t’imaginer. »[54]

La présence auctoriale est conjugée, démultipliée, transformée au cours du récit. Des souvenirs, des rêves, des anticipations, des événements effectifs ou présentés comme autobiographiques, des citations poétiques intercalées structurent et complexifient le texte : le récit se renouvelle par des articulations, par le foisonnement typologique du texte[55]. Les projections, les reprises, les réécritures, les itérations et reconfigurations définissent les contours d’un processus d’invention (réinvention) de soi ; le trajet de la fiction annonce, encadre et développe la (re)découverte et la (re)création de soi et de l’autre.

Matamimi est une traversée textuelle d’héritages, de traditions, d’univers personnels, interpersonnels et intraindividuels. Le personnage de Matamimi est présenté comme l’objet d’une fascination, comme une accumulation de diverses qualités décrites et nuancées dans l’ouvrage, mais également comme une démarche philosophique et identitaire (dépositaure de renaissance, de la diversification, du renouveau, de l’écriture), dépouillé de ses attributs, en tant qu’instances et réalisations d’une essence symbolique qui se présente plurielle, insaisissable et illimité sous le regard de la narratrice qui s’installe dans différentes positionnalités narratives, énonciatives.

Le roman transcrit, temporalise et phénoménalise l’être de Matamimi, l’installe au centre d’une référentialité constante. À part la constance de soi, le personnage de Matamimi peut être caractérisé par un « clignotement phénoménologique »[56], où la « constance de soi »[57] se dissout ou est reléguée au second plan par l’inconstance et la variabilité des horizons narratifs, par la différentialité inscrite au niveau textuel.

De cette manière, le récit nous apparaît comme une sédimentation textuelle d’un processus d’invention, d’identification et de narration (celles de Matamimi), et peut être rapproché à l’eventail de fonctionnalités des tiki[58], notamment dans le sens de servir de réceptacle à un esprit : l’intentionnalité de la création sous-tend l’ouvrage entier ; l’auteure opère une transposition architectonique (à partir d’une affectivité et de contenus psychiques, mentaux vers le domaine de l’effectivement éprouvé, ressentie, palpable, créé)[59]. Le récit est un hymne à l’existence de Matamimi

Le roman est un parcours autoréflexif qui s’installe dans « l’intimité de soi avec soi » et dans « l’intimité de soi avec un autrui »[60]. Le regard maternel, la contemplation, l’invocation et la mise en parole et en écrit rythme, structure et manifeste l’être de Matamimi en tant que sujet transitionnel (situé par le récit entre le Moi fictif et le Moi actuel de l’auteure, dans un rapport de « transition infinie de soi à autrui et de soi à soi »[61]).

 

4. Histoire(s)

La perception temporelle de l’esprit faisant l’expérience de son action, des nouvelles dimension du vécu ouvertes par l’arrivée des Européens, l’appréhension du monde et des changements se faisaient selon les structures mentales existantes[62]. La médiation entre les composantes externes, les éléments de la réalité et les représentations internes ne formait pas une unité synthétique dans les compte-rendus des premiers explorateurs (phénomène qui avait des conséquences influant sur la déformation de le vérité, sur les distorsions perceptives et interprétatives).

L’analyse et l’écriture de la mémoire collective est considérablement régie par des moments de dévoilabilité[63], par des zones d’ouverture et de manifestation, par une orientation analytique existentielle, par les repères structurant la mémoire collective, par une visée d’explicitation de soi-même. Ari’irau Richard, dans « Le corps humain, c’est le corps social », prend le corps comme « indicateur empirique de la mémoire collective »[64] : le corps est abstrait et explicité en tant que structure biologisée-corporéisée de la littérature, comme chair textuelle/textualisée animée, vivante, pulsionnelle de l’histoire :

« Le corps, c’est le Corpus, l’ossature de notre littérature contemporaine. Autrefois, le corps était le support de l’histoire de l’Homme polynésien, le tatouage ancré dans la peau symbolisait l’entre deux mondes : Ni à l’intérieur du corps, ni à l’extérieur de la peau, le tatouage était la transcendance de la frontière. Le nouveau corps emprunt d’encres est celui de notre littérature. »[65]

Marie-Claude Teissier-Landgraf s’interroge sur les caractéristiques discursives de l’histoire, sur l’horizon d’expériences, sur l’apprésentation[66] des perspectives et représentations narratives individuelles et collectives, sur les modalités possibles de la description d’une temporalité plurielle constituante et constituée (de l’histoire). L’auteure examine l’appropriement même des structures narratives, les modèles perceptifs, les modes de conscience du monde et de soi-même, la révision (auto)critique du passé.

« Histoire. Quelle Histoire ?

Celle des historiens qui s’inscrit dans la Recherche, qui désire être objective […] Celle qui est également plurielle et sans cesse à écrire et à ré-écrire ?

Je choisirai […] la seconde […] à écrire et à ré-écrire sur l’histoire ancienne de la Polynésie française […] en collectant les faits […] faire revivre les personnages, leurs relations, tout en cultivant le doute et en suscitant l’argumentation. Cette histoire-là – vécue par le peuple autochtone – est muette : paroles et confidences envolées vers nulle part, témoignages écrits (puta tupuna) enterrés avec leurs auteurs. »[67]

Teissier-Landgraf développe et réfléchit sur la problématique de l’intersubjevtivité et de la plurivocité de l’histoire, l’effet des contaminations[68] et superpositions des univers de l’identité et de l’altérité, des différentes pensées fondatrices de diverses visions et interprétations de l’historicité et propose un regard analytique sur la relationnalité complexe moi-histoire-autre. Elle se confronte aux traits structurels et thématiques de la « mémoire officielle antérieure »[69], l’herméneutique longtemps déterminante de « l’histoire de la Métropole »[70], pour revivifier, exposer et expliciter les souvenirs longtemps vouées au silence.

« Mémoire. Quelle mémoire ?

[…] La mémoire, ici, est émotion, subjectivité, fixées par l’esprit ; elle privilégie les jugements sur le passé, détermine nos sentiments d’appartenance ; (c’est elle qui suscite les commémorations). »[71]

L’approche de l’auteure relève de l’intropathie[72], elle met en relief la nécessité de réécrire et retravailler les expériences temporelles refoulées ; la compréhension existentielle n’est possible qu’à travers l’analyse de la pluralité des expériences subjectives, de l’introjection[73], de la discursivité historique, de la multiplicité des réalités psychiques et culturelles. Il s’agit également de franchir le clivage entre « mémoire officielle, dominante et mémoire souterraine »[74]. Nous sommes confrontés à l’image d’une Polynésie spatio-temporellement périphérisée qui doit se transformer en lieu de renégociation, de réinvention, de réhabilitation des différentes dimensions de l’oubli, de la déformation mémorielle.

« Oubli.

Tout ce qui a trait à la civilisation ancienne des îles de la Société d’alors, a disparu de façon plus complète qu’en aucun autres groupes d’îles de la Polynésie. […]

Histoire, mémoire de l’oubli. »[75]

5. « ton corps est ton pays »

Matamimi de Stéphanie Ari’irau Richard est une démarche herméneutique du sujet. L’auteure fait l’étude de la subjectivité, de la conscience constituante par une analyse relationnelle et égologique. La conscience corporelle et intersubjective est liée à l’identité, à la spatialité : le monde environnant est à méditer, à connaître, à vivre dans l’enchevêtrement du paysage corporéisé, dans la fusion psychophysique du charnel et du géographique incorporé. La réflexion conscientielle est enracinée dans la corporéité qui est, à son tour, liée à la sphère expérientielle du monde « co-posé »[76], figurant comme élément de constitution corrélative.

Corps, identité métaphysique, monde chosal ou environnement physique et l’univers communicatif de l’entre-deux sont entrelacés, un statut phénoménologique particulier se définit à partir de l’introjection du monde dont le corps sert de localité dans laquelle ses modalités, sa structure et ses éléments se déploient ; le monde apparaît comme projection et réalisation des dimensions corporelles, comme lieu de réalisation des influences et actions intérieures. La compréhension de l’être et de l’identité ne peut se faire qu’en s’appuyant sur l’échange des structures, expériences et déterminations du corps et du monde en relation de proximité, de réflexivité et d’interinfluence.

Ces passages, ces expériences actualisées des autres structurent l’explicitation d’un horizon collectif, une interprétation prototypique[77] du moi ayant comme expérience et base originelles le nous. L’intuition originelle, l’antériorité du moi sont situées dans un flux temporel axé sur la dégénérescence corporelle.

« Sortent de l’ombre […] tous les esprits du passé et ceux de l’avenir, temps passé temps futur mélangés et malaxés comme dans cette écriture… une foule d’êtres, une foule de vies et ainsi entourent en demi-cercle la belle Matamimi ; et ainsi deviennent spectateurs, voyeurs, fantômes, vivants et morts… sur la terre explosée que nous présente l’océan. À Tahiti, sur cette terre fertile d’amours et de déchirements, théâtre de nos vies insulaires, Matamimi, tu nous as réunis, ce soir. »[78]

L’espace, la terre explosée, éclatée est « l’extension topologique du corps »[79] : la description et la modélisation spatiales et corporelles sont liées ; la géographie est incorporée, internalisée, le propre de l’intérieur s’externalise, se mondanéise, se réifie[80].

 

 


[1] De nombreux auteurs et théoriciens attirent l’attention sur l’obsolescence, voire le caractère arbitraire des appellations et dénominations géographiques. Voir à titre d’exemple MALLATRAIT, Clémence, La France, puissance inattendue : Au XXIe siècle dans le Pacifique Sud, Paris, L’Harmattan, 2009, p. 17-21.

[2] Notamment les Marquises, les Tuamotu, les Gambier, les Australes et la Société. ORLIAC, Catherine, Fare et habitat à Tahiti, Marseille, Parenthèses, 2000, p. 11-12.

[3] BLONDY, Caroline, « Le tourisme en Polynésie française », Cahiers d’Outre-Mer, n° 230, juin 2005, p. 153-170.

[4] Cf. WEBB, Jen et NANDAN, Kavita (éd.), Writing the Pacific, Suva, Pacific Writing Forum, 2007, p. 1.

[5] L’analyse et l’étude de cette aire géo-épistémique nécessite une mise en contexte inter- et pluridisciplinaire, la définition de problématiques multiparadigmatiques qui font appel à des méthodologies comparatives, interconnectées. Concernant les principes holistiques des études océaniennes  voir SUBRAMANI, « Emerging Epistemologies », conférence prononcée à Nouméa, Nouvelle-Calédonie, les 20-24 octobre 2003, [En ligne].

[6] Voir THAMAN, Konai Helu, « Decolonizing Pacific Studies: Indigenous Perspectives, Knowledge, and Wisdom in Higher Education », The Contemporary Pacific, Vol. 15, 2003, p. 1-17. et VERSTRAETE-HANSEN, Lisbeth, « Étranges ressemblances ou mêmes différences ? Préliminaires pour l’étude des transferts culturels dans l’espace littéraire francophone », BAINBRIGGE, Susan et al. (éds.), Francographies. Identité et altérité dans les espaces francophones européens, New York, Peter Lang, 2010, p. 55-70.

[7] SUBRAMANI, op. cit.

[8] À ces aspects s’ajoutent la genèse très différenciée, plurifacette des littératures de l’aire océanienne, les différences culturelles, politiques des auteurs d’horizons très divers. Cf. SUBRAMANI, « The Oceanic Imaginary », The Contemporary Pacific, Vol. 13, 2001, p. 149-162.

[9] couche mémorielle (ancêtres) ; passé familial et personnel ; présent éternel qui sous-tend l’ouvrage dans son intégralité ; futur individuel, familial ; avenir collectif, insulaire

[10] Pour une typologie et une analyse des finalités de la mémoire cf. BOHLER, Danielle, « Le temps de la mémoire : le flux, la rupture, l’empreinte », Eidôlon, septembre 2007, n°72, p. 7-12.

[11] transcriptions de la fluidité orale – hiccéité (existence en un lieu déterminé), eccéité (caractéristiques matérielles et immatérielles de l’essence particulière) – définitude textuelle

[12] légende, tout ce qui appartient à l’oralité (parau : parole). Voir DEVATINE, Flora, « Written tradition, oral tradition, oral literature, fiuriture », Shima: The International Journal of Research into Island Cultures, Vol. 3, 2009, p. 10-14.

[13] AVEI’A : boussole, compas ; guide (personne ou livre), directoire. Source : Dictionnaire de l’Académie Tahitienne (Fare Vāna’a), désormais DictFV, [En ligne], www.farevaana.pf/dictionnaire.php

[14] Ā’AI (pa’umotu : KAKAI) : légende, conte, histoire, fable. Ibid.

[15] MAT., p. 7.

[16] ‘ŌRERO (pa’umotu : KŌRERO) : adj. éloquent → langage, discours, allocution ; orateur, discoureur. Ibid.

[17] OSU, Sylvester N. et al. (éds.), Construction d’identité et processus d’identification, Berne, Peter Lang, 2010, p. 1-12.

[18] OUELLET, Pierre, « Le lieu et le non-lieu : La structuration spatiale des images de soi et de l’autre dans les contextes interculturels », TURGEON, Laurier (dir.), Les entre-lieux de la culture, Québec, Presses de l’Université Laval, 1998, p. 357-372.

[19] notamment la présence de passages influencés par les formes orales, des passages de récit traditionnel, des passages poétiques insérés [trois citations d’autres auteurs : « Enfance » de Jean-Marc Tera’ituatini Pambrun (p. 38.), « Les âges du plaisir » de Flora Aurima Devatine (p. 57.), « La jeune femme de notre Pays » d’Araia Amaru (p. 79.) ; un passage poétique de l’auteure : « L’hymne à ma fille » (p. 107-108.)]

[20] Elle se présente dans toute énonciation et récitation, dans toutes les strates narratives mais également dans le mutisme introspectif de la narratrice, dans la solitude, dans l’écoute intérieure, dans le faisceau complexe des manifestations et processus d’auto-appropriation et d’auto-analyse du récit.

[21] Cf. également VERSTRAETE-HANSEN, Lisbeth, « Étranges ressemblances ou mêmes différences ? Préliminaires pour l’étude des transferts culturels dans l’espace littéraire francophone », BAINBRIGGE, Susan et al. (éds.), Francographies. Identité et altérité dans les espaces francophones européens, New York, Peter Lang, 2010, p. 55-70. et DELASALLE, Simone, « Quelques remarques sur le domaine de l’autonymie dans l’écriture romanesque », AUTHIER-REVUZ, Jacqueline et al. (éds.), Parler des mots : Le fait autonymique en discours, Paris, Presses Sorbonne Nouvelle, 2003, p. 185-192.

[22] CINTAS, Jean-Guy, « Poésie et Mémoire : L’efficacité du chant généalogique », Eidôlon, n° 72, 2006, p. 237-251.

[23] DEVATINE, Flora, op. cit.

[24] L’auteure analyse la naissance et les racines du peuple mā’ohi, l’histoire des îles, les enjeux et l’avenir de la littérature polynésienne dans le chapitre « La littérature polynésienne » (p. 87-90.).

[25] Le récit antonymique et auto-référentiel de la narratrice est le moyen de l’élaboration de la prédominance de Matamimi qui, comme un état stationnaire ou une référence inhérente et intrinsèque, se superpose à toute manifestation de la narratrice et dont la présence, en tant qu’élément impulsionnel et positionnel central, engendre la présence de l’auteure.

[26] Voir également SOULAS, Johann, Théorie mathématique et métaphysique de l’esprit, Paris, Publibook, évszám, p. 11-20.

[27] MAT., p. 116.

[28] Ibid., p. 117.

[29] MARAE (proto-polynésien : MALA’E) : adj. défriché, débarrassé des arbres, brousseailles, détritus, comme un jardin, un lieu de réunion ; plate-forme construite en pierres sèches et où se déroule le culte ancien, associé souvent à des cérémonies à caractère social ou politique. DictFV

Voir également MARAE FARA : personnage sage, qui connaît bien les choses. Ibid.

[30] Cf. Lavocat, Françoise, « Le comparatisme comme herméneutique de la défamiliarisation », Vox Poetica, [En ligne].

[31] Concernant la réévaluation de la tradition, l’identité pluriculturelle, les schémas mentaux polynésiens et occidentaux voir ANDRÉ, Sylvie, « Le ‘‘bricolage’’ culturel dans les romans contemporains de la Région Pacifique », RAMSAY, Raylene (dir.), À la croisée des cultures : De la négociation des identités dans les littératures francophones et anglophones du Pacifique, Bruxelles, Peter Lang, 2010, p. 49-62.

[32] MAT., p. 9.

[33] FENUA (tongien : FONUA) :  Île, pays, terre, domaine, propriété, séjour des hommes. DictFV

[34] Voir également CLÉMENS, Éric, « Phénoménologie et fiction », Littérature, n°132, 2003, [En ligne], p. 48-54.

[35] MĀMĀ : Maman, mère, femme mûre, grand-mère. DictFV

[36] HĪMENE (anglais : HYMN) : chant, cantique. Ibid.

[37] MAT., p. 9.

[38] DEVATINE, Flora, op. cit., p. 11.

[39] PEHE (samoan : PESE) : chant traditionnel, chansonnette. DictFV

[40] PAPA : planche, pierre plate, table de pierre, banc, assise de corail comprimé, stratifié, bassin, fondation d’une famille. → PAPA TUPUNA : ascendance. Ibid.

[41] POU : poteau, pilier, pilotis, colonne, pièce de bois. Ibid.

[42] FAURA’O : tout moyen de transport par mer, par extension tout moyen de transport terrestre et aérien. Ibid.

[43] Concernant les ruptures dans le tissu de la continuité traditionnelle – causées par la colonisation et l’évangélisation – à l’origine de la nécessité d’une réinvention, récréation et réappropriation identitaire voir ANDRÉ, Sylvie, op. cit.

[44] NEHENEHE : adj. beau, joli, soigné, élégant. DictFV. Cette désignation revient plusieurs fois dans le texte de Matamimi (p. 9., 10., 11., 13.).

[45] ALEXANDER, Robert, La refondation richirienne de la phénoménologie, thèse de doctorat, Université Toulouse 2 Le Mirail, 2011, [En ligne], p. 14-24.

[46] Chantal Spitz, Flora Devatine, Titaua Peu, Célestine Hitiura Vaite, Jean-Marc Terai’tuatini Pambrun, Louise Peltzer, Jimmy Ly (p. 13.)

[47] Il s’agit notamment, entre autres, de la survie de l’héritage traditionnel, des tendances et partis politiques tahitiens, de la présence des essais nucléaires français de Moruroa et de Fangataufa dans l’imaginaire contemporain. Sur l’explosion démographique, les influences du bouleversement économique sur la société polynésienne tradionnelle et l’histoire des essais nucléaires cf. AUZIAS, Dominique et LABOURDETTE, Jean-Paul, Tahiti. Polynésie française, Paris, Nouvelles Éditions de l’Université, 2012, p. 67-69.

[48] Je réfère ici notamment à la métalepse de l’auteur qui caractérise l’intervention auctoriale, la transgression du seuil de la représentation. Cf. GENETTE, Gérard, Métalepse, Paris, Seuil, 2004, p. 7-16. Matamimi est une micro-biographie, un chant de création qui invoque et donne naissance à la fille de la narratrice du point de vue auctorial qui se caractérise par une présence kaléidoscopique (couches temporelles, perspectives changeantes, dialectique et dynamique de distanciations et de rapprochements). Ces permanences et inconstances justifient plutôt l’usage du terme « identité-ipséité » qui fait référence à « l’unité cohérente » tout en exprimant le fait d’être « constamment en chantier ». Voir VAN ACKER, Isa, « La question de l’héritage dans Le Testament français d’Anreï Makine », JONGY, Béatrice et KEILHAUER, Annette (éds.), Tansmission/héritage dans l’écriture contemporaine de soi, Clermont-Ferrand, Presses Universitaires Blaise Pascal, 2009, p. 117-

[49] Le passage de l’intelligible au sensible, visible (primauté du regard) revient tout au long du texte pour contribuer à l’efficacité de l’effet constituant, créatif du discours : « Pour satisfaire aux goûts de tous, on les a faits de toutes les couleurs, blonds, bruns, roux, noirs. On les a faits frères et sœurs. », « Pour satisfaire aux goûts de tous, on y a déposé des jeunes femmes, des jeunes mères, des jeunes adolescentes, comme toi Matamimi […] au bassin de Vénus, à la démarche souple et dansante qui sentent bon le mono’i [huile de coco parfumée], qui font du karaté ou du tāmūrē [danse lancée dans les années 50, sur des pas traditionnels] qui se promènent au marché, des perles noires, jaunes, vertes, roses, aux oreilles, pêchées par les hommes du fenua nehenehe. » Cf. SURGERS, Anne, Et qui dit ce silence ? La rhétorique du visible, Paris, Presses Sorbonne Nouvelle, 2007, p. 211-223.

[50] La mêmeté « suppose un substrait intangible », tandis que l’ipséité « permet l’inclusion du changement dans l’identité ». Voir THOMASSET, Alain, Paul Ricœur : Une poétique de la morale, Louvain, Presses Universitaires de Louvain, 1996, p. 158.

[51] MAT., p. 7.

[52] Ibid., p. 113.

[53] Ibid., p. 116.

[54] Ibid., p. 125.

[55] La progression du texte se réalise dans des translations, transpositions, hybridations textuelles : la variabilité générique et thématique (remontrances, influences des chants ancestraux, passages poétiques insérés), la sédimentation d’insertions intertextuelles encadrent les fragments scripturaux qui constituent les composantes de la reconstitution et reconfiguration mémorielle.

[56] RICHIR, Marc, Phénoménologie en esquisses : nouvelles fondations, Grenoble, Jérôme Millon, 2000, p. 13-15.

[57] THOMASSET, Alain, op. cit., p. 159.

[58] TI’I (pa’umotu : TIKI) : image d’un Dieu, statue (moderne), mauvais esprit représenté par des statues de pierre. DictFV. Voir également FER, Yannick, Pentecôtisme en Polynésie française : l’Évangile relationnel, Genève, Labor et Fides, 2005, p. 215-216. et MICHÈLE, Julien et al. (dir.), Mémoire de pierre, mémoire d’homme : Tradition et archéologie en Océanie, Paris, Publications de la Sorbonne, 1996, p. 348-356.

[59] « Matamimi ma fille, tu es si vivante. Tu existes, tu es là. Suis-je donc la seule à te voir ?! J’ai écrit ce journal pour toi Matamimi. », MAT., p. 116. Le même acte de création peut être retracé dans la formule constitutive répétée du chapitre « René, Henri, Constant » : « Tous les matins, quand j’ouvre les yeux, mon père renaÎt », MAT., p. 23-28.

[60] RICHIR, Marc, « Le tiers insdicret. Ébauche de phénoménologie génétique », Archivio di Filosofia, 2007, p. 169-173.

[61] Ibid., p. 171.

[62] Et cela concernait évidemment les Tahitiens aussi bien que les Européens. Les descriptions des rencontres avec la reine Purea sont éloquentes à cet égard. Soulignons également les divergences dans la perception de la culture : « Insiders do not experience culture as a mapped way of living. Insiders experience culture as a process of practical visions. Insiders experience culture as a merging of all sorts of polarities. » DENING, Greg, op. cit., p. 127-146. (ici p. 138.)

[63] Je réfère ici à la saisissabilité et l’ouverture d’un être, d’un phénomène dans le surgissement de sa présence. Il s’agit de l’explicitation des caractéristiques fondamentales, de l’éventail et de la plurivocité onto-phénoménologiques qui se dévoilent dans l’acte analytique.  JULLIEN, Philippe, op. cit., p. 25-28.

[64] POLLAK, Michael, Une identité blessée, Paris, Métailié, 1993, p. 15.

[65] » RICHARD, Stéphanie Ari’irau, « Le corps humain, c’est le corps social », p. 156.

[66] Le terme, proposé par Husserl, est destiné à rendre compte de l’acte constitutif (de l’autrui), de la co-présence, de la coexistence (de moi-même et de l’autrui). Voir NAUDIN, Jean, Phénoménologie et psychiatrie, Toulouse, Presses Universitaires du Mirail, 2007, p. 156-158.

[67] TEISSIER-LANDGRAF, Marie-Claude, « Histoire, Mémoire de l’Oubli », Littérama’ohi, n° 16, juin 2009, p. 10.

[68] MADIONI, Franca, « Méthodes phénoménologiques en psychotérapie », Comprendre, n° XVIII, 2003, p. 113.

[69] POLLAK, Michael, op. cit., p. 20.

[70] TEISSIER-LANDGRAF, Marie-Claude, op. cit., p. 10. 

[71] Ibid., p. 11.

[72] Phénomène de conscience qui désigne une orientation centripète (en soi, en sa vie conscientielle). Voir KASSIS, Raymond, De la phénoménologie à la métaphysique : Difficultés de l’intersubjectivité et ressources de l’intropathie chez Husserl, Grenoble, Jérôme Millon, 2001, p. 125-126.

[73] Processus de l’incorporation, de l’identification inconsciente de l’image, du modèle d’une personne au moi. Cf. STAMELMAN, Richard, « Le poétique et l’expérience de la perte », MAULPOIX, Jean-Michel (éd.), Poétique du texte offert, Fontenay/Saint-Cloud, E.N.S. Éditions, 1996, p. 46.

[74] POLLAK, Michael, op. cit., p. 22.

[75] TEISSIER-LANDGRAF, Marie-Claude, op. cit., p. 11.

[76] HUSSERL, Edmund, De la réduction phénoménologique : Textes posthumes (1926-1935), Grenoble, Jérôme Millon, 2007, p. 126.

[77] NAUDIN, Jean, op. cit., p. 151.

[78] Ibid., p. 116.

[79] ANDRIEU, Bernard, op. cit., p. 180.

[80] Matamimi se revêt de la forme d’une concrétisation stellaire remplissant le rôle d’un point de référence directionnel : « toi [Matamimi] l’étoile polynésienne, l’existence éternelle de ces pages. », MAT., p. 114.