Créations

Extrait de poésie contemporaine féminine, traduit de l’arabe

Equation

Racil Saad[1]

Rien ne meurt

Depuis qu’une alouette arpente le bord de la fenêtre

Sans quitter le vague de l’âme.

Rien ne meurt

Depuis le susurrement s’une veine saillante

Sur la tempe de l’intuition, un génie jamais dévoilé.

Rien ne meurt

Depuis que la mort se teinte de pourpre

entre les mains du serveur du soir

irrigant le vase des rêves

Rien ne meurt

Depuis le chant de Sayyab,[2]

le Hennissement des « Bracelets de Ibnat Al Jalabi »[3]

implore un poème

Rien ne meurt

depuis que je me suis endormie

dans les bras de Ibn Rabiaa,[4] chaste de passion….

Mais, tout meurt

quand le nectar sur les lèvres de la belle

est sècheresse,

quand le langage, aux yeux de l’homme,

est cécité.

 

 

 

Une journée très ordinaire

Nour Albaouardi[5]

Je me persuade d’un beau mensonge auquel  je crois un peu

Et auquel  je répugne par la suite, car il demeure un mensonge…

Aucune importance.

C’est le temps restant d’une  visiteuse  insupportable

La même  visiteuse munie de pieds sur lesquels elle se meut

Me les met au nez parfois  pour s’en débarrasser ensuite.

 

Quand tu tends la main et que  je tends la mienne,

Quand un passant traverse au milieu et nous sépare,

Quand  je m’appuie sur toi… et je marche sans toi

Tu serais alors effectivement déjà  parti  laissant ma main tendue.

 

Les voix sont redoutables,

Celles qui rient lentement sont très terrifiantes.

S’il  t’atteint ce que tu crains, tu finiras sûrement par t’en accoutumer.

Je n’ai nul besoin d’une idée  fardée pour me réjouir,

Je me bourre le cerveau d’un balbutiement qui m’est  inintelligible

Il me semble que j’ai enfin  raison.

Que  je dorme  beaucoup ou que je me prive de sommeil,

Hors de ma fenêtre il y avait une vie  galopante

Et qui, subitement,  ne l’est plus.

 

 

 

Poèmes

 

Maysoun Ariani[6]

.

Vœux prohibés

A cause de mes souhaits

Il ne m’est pas permis de devenir une rose

Ni de me presser vers Dieu

Prohibé aussi d’être un oiseau

Qui offre les cerises aux anges

Et parce que je ne suis pas une nuée

Il est impossible même de me couvrir de soleil

Je suis semblable à un petit lapin

Je dois trépasser en solitaire

Sur ta chère balançoire

 

 

 

Petit à petit

Oh ! Toi, hirondelle,

Qui te donnerait main forte

Autre que le pieu naïf

Sur le bord du poème

Tendre comme un bourgeon

Planant comme une absence ?

Oh ! Toi, fière de ton allure

Ne te presse pas

Afin que la vie ne se froisse.

 

Retour

En un clin d’œil

Tu remis de l’ordre dans mon cœur

Essuyas  la peine flétrie dans les coins

Débarrassas la fenêtre de l’aube fanée

Et me la remis nette et vierge.

 

 

Paradis

Comme de coutume vers la fin de la nuit

J’ouvre mes fenêtres

Attendant que tu amènes l’univers

Au brasier de ma passion ;

Que tu épluches le paradis pour mes chants

Je ne parlerai pas à présent du ciel

Ni des fleurs de notre sévère voisine

Mon cœur maintenant est plus ardent

Qu’un grain de châtaigne.

 

 

Cadeau

De cellophane,

Mon cœur est emballé

Comme la pleine lune ce cœur est perforé.

Elle est semblable à une végétation nuisible

Dit le destin,

Entre les touches du piano

Elle te cherchera.

 

 

 

 

 

 

 


[1] Jeune poétesse koweitienne

[2] Poète irakien, 1926/1964. l’ un des pionniers de la poésie arabe moderne.

[3] Texte célèbre du dit poète

[4]  Poète arabe classique (643/711)

[5] Jeune poétesse saoudienne

[6] Jeune poétesse yéménite